Si elle conteste la décision de la commission départementale de médiation, l’administration doit introduire un recours directement contre celle-ci.
Cet avis contentieux du 21 juillet 2009, « Mme Idjihadi » (req. n° 324809), donne des indications sur la jurisprudence du droit au logement.
Les circonstances du litige
Le 5 février 2009, a été transmis au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le jugement du 2 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Versailles, avant de statuer sur la demande présentée par Mme Idjihadi relative à la décision du 30 janvier 2008 de la commission de médiation de l’Essonne réorientant sa demande de logement vers une offre d’hébergement, a décidé, par application des dispositions de l’article L.113-1 du Code de justice administrative, de transmettre le dossier au Conseil d’Etat pour avis.
Les questions posées par le tribunal
Dans le cadre du recours contentieux spécifique institué par l’article L.441-2-3-1 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) en faveur des personnes qui se prévalent d’un droit au logement opposable, les conclusions reconventionnelles du préfet tendant à l’annulation de la décision de la commission départementale de médiation conférant au demandeur un droit à bénéficier d’une offre de logement ou d’une offre d’hébergement sont-elles recevables ? Le préfet peut-il, au soutien de conclusions tendant au rejet d’un recours contentieux présenté dans les conditions prévues par l’article L.441-2-3-1 du CCH, invoquer, par voie d’exception, et dans les conditions de droit commun, l’illégalité de la décision de la commission départementale de médiation conférant au demandeur un droit à bénéficier d’une offre de logement ou d’une offre d’hébergement ?
Les réponses du Conseil d’Etat
Eu égard à la nature de son office, il n’appartient pas au juge, saisi en vertu des dispositions de l’article L.441-2-3-1 du CCH, d’apprécier la légalité des décisions des commissions départementales de médiation, tant à la demande de l’administration qu’à celle du demandeur de logement ou d’hébergement. Il doit s’assurer, en revanche, avant d’ordonner le logement, le relogement ou l’hébergement de l’intéressé :
— dans le cas d’une décision de la commission départementale de médiation reconnaissant un droit à un hébergement : que la demande de l’intéressé a été reconnue comme prioritaire par la commission et que ne lui a pas été proposée une place dans une structure d’hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale ;
– dans le cas d’une décision de la commission départementale de médiation reconnaissant un droit à un logement : que la demande de l’intéressé a été reconnue comme prioritaire et devant être satisfaite d’urgence par la commission, et que ne lui a pas été offert un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités définis par la commission.
Toutefois, il n’y a pas matière à ordonner le logement, le relogement ou l’hébergement de l’intéressé lorsque l’administration apporte la preuve que l’urgence a complètement disparu.
Les enseignements
Il résulte de ce qui précède que le représentant de l’Etat dans le département ne peut utilement, dans le cadre d’un recours exercé par un demandeur de logement ou d’hébergement en vertu de l’article L.441-2-3-1 du CCH, ni demander l’annulation, par la voie d’une demande reconventionnelle, ni exciper de l’illégalité de la décision de la commission départementale de médiation, qui présente par ailleurs le caractère de décision créatrice de droit, faisant grief, contre laquelle il est possible au représentant de l’Etat, s’il s’y croit fondé, d’exercer un recours tendant à son annulation, et, le cas échéant, à sa suspension.
Commentaire
Cet avis permet à l’administration de savoir qu’elle doit désormais introduire un recours contentieux directement contre la décision de la commission départementale de médiation reconnaissant un droit au logement ou à un hébergement, qui est créatrice de droit au sens de la jurisprudence Ternon, si elle entend la contester. L’article L.441-2-3-1 du Code de la construction et de l’habitation prévoit en effet que le président du tribunal administratif ou le magistrat qu’il désigne statue en urgence, en cas de refus d’offre de logement, dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. Lorsqu’il constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et doit être satisfaite d’urgence, et que n’a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités, il ordonne le logement ou le relogement de celui-ci par l’Etat.