Doit-on contraventionnaliser le délit de consommation de cannabis ?

Doit-on contraventionnaliser le délit de consommation de cannabis ?

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L’exécutif veut rétrograder le délit d’usage de cannabis, punissable d’un an de prison et 3 750 euros d’amende, en contravention, pour désengorger les tribunaux. Face au défi sanitaire et sécuritaire, les maires sont divisés. Illustration avec Bernard Reynès, député (LR) des Bouches-du-Rhône, ex-maire de Châteaurenard, et Bruno Beschizza, maire (LR) d’Aunay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis).

Pour : Bernard Reynès, député (LR) des Bouches-du-Rhône, conseiller municipal, ex-maire de Châteaurenard

"Il est nécessaire que les lignes bougent et que nous sortions d’une situation hypocrite ! Des pays comme l’Italie, l’Espagne, le Portugal ont commencé à se pencher sur ce sujet-là dans les années 1990 et ont déjà adopté des positions plus pragmatiques… De toute façon, le système actuel ne fonctionne pas. Et les syndicats de police l’expliquent très bien : les procédures en lien avec l’arrestation d’une personne en possession d’une drogue légère sont très lourdes, alors qu’en bout de chaîne, les sanctions pénales sont finalement peu appliquées. Donc, par honnêteté intellectuelle, et à partir du moment où les réponses pénales n’existent plus, je suis en faveur de cette mesure qui permettra au moins d’apporter une réponse immédiate à l’usager de cannabis.

Un fonds dédié à la prévention. Ce que je souhaiterais en revanche, et je ne suis pas le seul, c’est que ces sanctions financières alimentent un fonds dédié à la prévention et permettent de proposer une véritable offre de soins pour les personnes dépendantes. Là, cela aurait du sens ! Enfin il reste quelques questions qui seront tranchées, j’espère, dans la nouvelle loi : le montant de l’amende, le seuil de drogue toléré justifiant un usage personnel, mais aussi la question du cannabis au volant." n

Contre : Bruno Beschizza, maire (LR) d'Aunay-sous-Bois (93)

"C’est un très mauvais signal, tant pour la jeunesse qu’en termes de santé publique, car cela revient à donner un « permis de consommer » sous astreinte financière. Il y a un fondement important dans notre société : c’est l’interdit. Et consommer des stupéfiants, donc du cannabis, c’est interdit. Vous ne pouvez pas mettre sur un pied d’égalité le fait de ne pas payer son stationnement et celui de consommer du cannabis !

Quid de la récidive ? En enlevant cette notion délictuelle, et donc la capacité pour le juge correctionnel d’individualiser la peine, vous n’avez plus aucune marge de manœuvre pour sanctionner les personnes. Que ce soit la première ou la dixième fois que cela arrive, ce sera une amende ! Ce qui est exact en revanche, c’est que la procédure, la paperasse que doit remplir un policier face à un délit d’usage de cannabis, est fastidieuse… Je propose moi aussi une « simplification » avec, en première détente, une amende financière immédiate afin de « taper au portefeuille », car c’est effectivement efficace, mais en laissant la possibilité au Procureur de la République, selon le dossier, les antécédents et les conditions d’interpellation, de poursuivre ou non la personne devant le tribunal correctionnel."

Quelle contravention ? Depuis début septembre à l’Assemblée nationale, une mission d’information auditionne magistrats, policiers, gendarmes, associations et chercheurs. Un projet de loi devrait être proposé dans les quatre mois à venir. La question de la classe contraventionnelle (de l’amende forfaitaire à celle actée par un tribunal de police) devra également être tranchée.

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