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© Flickr CC by European Cyclists
L’Observatoire des mobilités actives vient de rendre public son rapport sur les politiques locales menées en faveur des piétons et des cyclistes en France. L’occasion de faire le point à mi-mandat et de démontrer que le vélo en ville peut devenir un levier économique pertinent.
Finalement tout va bien ! Il y a trois ans, le club des villes et territoires cyclables - à l’origine de l’enquête de l’Observatoire des mobilités actives – n’avait pas caché sa crainte de voir les villes ayant changé de couleur politique après les élections municipales de 2014, tourner le dos au vélo. Il n’en est rien. Bien au contraire, à lire la dernière édition de l'enquête présentée le 31 janvier.
Parmi les indicateurs encourageants, et en progression par rapport à 2013, on retrouve ainsi le pourcentage de voiries aménagées pour les cyclistes dans la ville : un taux qui atteint désormais 26 %. Quant au budget annuel moyen dédié au vélo, il est passé dans les communes interrogées de 5,8 euros par habitant en 2013 à 7,7 euros par habitant en 2016. L’offre de stationnement progresse elle aussi (+19% entre 2013 et 2016).
La percée des zones à 30 km/heure
Mais le plus intéressant ici est le fait que les simples arceaux, toujours majoritaires, sont désormais remplacées par des stationnements « haut de gamme » : garages à vélo en gare ou locaux sécurisés dans les parking voitures. Si le stationnement a toujours été un enjeu majeur des politiques cyclables – « trouver un endroit où garer son vélo à l’arrivée » – il devient aujourd’hui incontournable avec la progression des Vélos à Assistance Electrique (VAE) dont le prix d’achat est assez élevé. « Les propriétaires de VAE tiennent à retrouver leurs vélos le soir » constate Michel Gillot, maire-adjoint de Saint-Cyr-sur-Loire.
Enfin, le point marquant de cette enquête est l’augmentation des zones à 30 km/heure en ville. « Pour la première fois, les aménagements cyclables ne sont plus majoritairement constitués d’aménagements séparatifs sur voirie à 50, 70 et 90km/heure » note l’Observatoire, « l’état des lieux 2015-2016 met en évidence la diffusion dans les territoires d’une autre façon de penser l’aménagement urbain qui donne la priorité à la fluidité (…) à la qualité de la vie locale ».
Un levier écologique et économique
Si le club des villes et territoires cyclables pointe également des domaines plus « faibles » que les villes pourraient investir dans la deuxième partie de mandat (se doter de chargés de mission vélo dans les communes de moins de 100 000 habitants ; donner l’exemple avec des plans de déplacement d’administration), l’association joue surtout la carte de l’incitation.
« Nous voulons montrer le potentiel économique et mal-connu de la filière vélo, ce sont des emplois made in France, un chiffre d’affaires made in France » lance Pierre Serne, président du club et élu écologiste francilien. Avant de poursuivre : « Nous avions avant des signaux positifs venus de pays comme le Danemark, mais désormais les travaux de l’Ademe quantifient les retombées favorables de la filière vélo ».
Cette étude parue au mois en septembre dernier portait en effet sur les « services vélos » (tout ce qui tourne autour du vélo : vélos en libre-service ; location longue durée de vélos et VAE ; aide l’achat de VAE ; garages sécurisés ; consignes en gare, ateliers de réparation, etc.). On y apprend que le développement de ces services par une collectivité permet une « démotorisation » des usagers. Ainsi, la moitié des bénéficiaires d’une aide à l’achat d’un VAE – 25% des collectivités qui ont répondu en proposent - abandonne leur voiture ensuite. Un point positif pour l’environnement et la question coûteuse de la congestion automobile.
L’inattendu potentiel de création d’emplois
Par ailleurs, le potentiel « emplois » de la filière vélos est également mesuré. « Les services vélos permettent de créer des emplois directs, nécessaires à leur organisation, et génère de l’activité économique pour les fournisseurs (de vélos, de VAE, de consignes de stationnement, etc.). Dans le cas d’un déploiement à plus grande échelle des services vélos en France, l’impact serait de plus de 3500 emplois directs créés et plus de 45 millions d’€ de chiffre d’affaires pour la filière du cycle (fourniture de vélos, VAE et des équipements de stationnement)» peut-on lire dans le rapport de l’Ademe.
Sans oublier les retombées touristiques autour du vélo qui peuvent aussi être précieuses. « Les cyclotouristes ont un potentiel économique plus important que les touristes en voiture, nous avons tout intérêt à les capter » détaille Michel Gillot, dont le territoire avec « La Loire à vélo » a déjà largement investi dans ce sens. Des leviers pertinents donc pour des élus, qui à budget contraint, sont forcément en recherche de solutions originales.
L’intercommunalité : levier ou frein des politiques du vélo ?
Pour Pierre Serne, l’intercommunalité est un échelon « plutôt bénéfique » pour le développement des politiques locales dédiées au vélo. Apportant une « cohérence » territoriale, cette échelle permet surtout d’aller « toucher » des communes périurbaines qui n’avaient pas encore sauté le pas, constate l’élu francilien. Reste que dans certains territoires, c’est l’inverse qui semble se produire. « Nous sommes en terre de mission, s’amuse Gilles Perole, adjoint à Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) et élu à la communauté d’agglo Pays de Grasse, les agglos ont des arbitrages financiers assez difficiles à faire en ce moment et s’il y a des agglos qui ont compris les enjeux gagnant-gagnant du vélo –économe en surface, en temps, en coût, en rapidité- pour d’autres collectivités, il faut encore changer le disque dur des élus qui sont au pilotage ».