Palais de l'Elysée, présidence de la République
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De la réunion de préparation de la Conférence nationale des territoires le 4 juillet au discours d’Emmanuel Macron sur les banlieues évoqué pour le 18 ou 19 juillet, les quinze jours à venir seront capitaux pour la qualité de la relation (financière) entre l’exécutif et les élus locaux. D’autant que les trois grandes associations d’élus sont déjà remontées contre l’attitude de l’Etat et pourraient boycotter la CNT…
Les deux semaines à venir pourraient bien constituer un tournant pour les relations qu’entretiennent les collectivités territoriales avec l’Etat. Jusqu’alors, depuis l’installation d’un nouvel exécutif, la qualité de la relation a été certes fluctuante au gré des annonces mal préparées par Matignon, mais jamais les liens n’ont été coupés. Tout récemment, Matignon peut même se targuer d’avoir convaincu 70 % des collectivités visées par la limite des dépenses de fonctionnement de signer un pacte avec l’Etat.
Oui, mais voilà, les trois principales associations d’élus – Association des maires de France, Assemblée des départements de France, Régions de France – se sont prononcées majoritairement contre le principe même de la contractualisation, soit qu’elles le trouvaient attentatoire au principe même de libre administration des collectivités, soit qu’elles refusaient de céder à l’Etat quand celui-ci n’accédait pas à leurs demandes sur d’autres dossiers – financement des allocations individuelles de solidarité pour les départements, réforme de la formation professionnelle et de l’apprentissage pour les régions.
Vers un boycott de la CNT malgré des dossiers brûlants
Résultat : comme elles l’avaient fait il y a près de trois mois, le trio associatif prend la parole communément ce 3 juillet lors d'une conférence de presse probablement pour annoncer qu’elles boycotteront la Conférence nationale des territoires prévue à ce jour mi-juillet. Une annonce qu’a déjà faite unilatéralement l’ADF le 26 juin dernier. Et pour l’heure, l’exécutif ne peut compter que sur l’appui des métropoles et grandes villes représentées par France urbaine et sur l’AdCF, dont les membres respectifs plébiscitent la contractualisation financière en espérant pouvoir ainsi peser sur d’autres dossiers, comme celui de la politique de la ville.
Avant la session pleinière, la CNT se sera réunie en format resserré – « l’instance de dialogue » - ce 4 juillet pour préparer les échanges. Au programme, pléthore d’autres sujets explosifs : la réforme de la fiscalité locale, mais aussi celle de la fonction publique alors que le rapport Action publique 2022 devrait finalement être diffusé concomitamment aux décisions du Gouvernement en la matière. ((Il y sera également question de l’eau et de l’assainissement. Car trois jours plus tard se tiendront, le 17 juillet, les assises de l’eau))
Peut-être sera-t-il également question de l’Agence de Cohésion des territoires, ardemment demandée par l’AMF, agence sur laquelle le préfigurateur, le commissaire général à l’Egalité des territoires Serge Morvan, devait rendre un rapport à l'exécutif à la mi-juin. Mais depuis les nombreuses interventions du CGET devant les assemblées d’élus ou lors de la création de la Banque des territoires par la Caisse des dépôts, c’est le silence radio qui prédomine sur cette agence promise par Emmanuel Macron… lors de la première CNT de juillet 2017 !
Au regard de tous ces dossiers suivis de très près par les acteurs publics locaux, l’exécutif semble avoir choisi à dessein un thème pour le moins consensuel - la cohésion urbaine en Europe – comme fil rouge principal de la CNT...
De Versailles au quartier politique de la ville, la parole présidentielle attendue
Entre temps, Emmanuel Macron doit prendre la parole devant le Parlement réuni en congrès à Versailles, le 9 juillet. Un an quasiment jour pour jour après l’inauguration de ce rendez-vous qu’il veut annuel, le président de la République ne devrait certes pas faire des collectivités le sujet principal de son intervention devant les députés et sénateurs. Mais il pourrait à l’occasion de cette adresse revenir sur la révision constitutionnelle et la réforme des institutions au sein desquelles le redécoupage des circonscriptions pour permettre la diminution de 30 % du nombre de parlementaires et la limitation du cumul dans le temps à trois mandats identiques consécutifs ne plaisent que modérément aux élus locaux, notamment aux hérauts des territoires ruraux.
Enfin, c’est le 18 ou le 19 juillet que le chef de l’Etat devrait préciser ses intentions concernant les banlieues. Car lors de son intervention du juillet, plus proche du stand-up que du discours annonçant des mesures concrètes, Emmanuel Macron avait indiqué la mi-juillet comme échéance pour fixer les orientations : aide au permis de conduire, instance de recours sur l’équité territoriale, rénovation urbaine des cœurs de quartiers, accompagnement des établissements fonciers sur les copropriétés dégradées, plan de lutte contre la drogue, etc.
Très remontés contre l’absence d’annonces sonnantes et trébuchantes et un discours présidentiel prenant clairement de la distance avec le rapport Borloo, les élus de banlieues attendent, eux aussi, le Président de la République au tournant pour une « séance de rattrapage » qui devrait se tenir cette fois-ci dans un quartier politique de la ville d’une commune de banlieue, loin des ors de l’Elysée.