Crèches de Noël : à installer avec précaution

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PJ A81 - 22/01/2018 16h:15

Bonjour On sent les limites de l'appréciation jurisprudentielle. Quel prosélytisme vise-t-on? La confusion du pouvoir religieux et civil existe-t-elle? Cela n'est plus. A l'heure où l'espace public est confisqué par certains prosélytes qui optent pour une confusion du religieux et du civil, la position des juges, gardiens de la laïcite paraît surannée.

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Crèches de Noël : à installer avec précaution

Carte-Creche-de-Noël

© Commune de Dourlers

Au cœur du débat juridique depuis plusieurs années, l’installation de crèches de Noël par des personnes publiques divise encore les juridictions administratives. Le point sur l’état du droit sur cette problématique sensible, issu essentiellement de deux décisions du Conseil d’Etat du 9 novembre 2016 (n° 395122 et 395223) qui différencient bâtiments publics et emplacements publics.

Par Elise Humbert, avocat à la Cour, SCP Seban & Associés

[Article initialement publié le 24 novembre 2017]

1- Le caractère mixte des crèches de Noël

Le Conseil d’Etat s’est prononcé en faveur de la nature mixte des crèches de Noël, considérant que celles-ci étaient susceptibles de revêtir « une pluralité de significations », en d’autres termes, tantôt profanes, tantôt, religieuses.
A ce stade, remarquons que s’il avait qualifié clairement ces crèches de Noël d’emblème religieux, leur installation aurait été interdite, de façon générale, « sur les emplacements publics ou en quelque emplacement public que ce soit », conformément à l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905.

Zone grise juridique. Tel n’a cependant pas été le cas, et c’est précisément la reconnaissance d’une possible qualification mixte de ces crèches de Noël qui est à l’origine de la solution particulièrement complexe finalement retenue, selon laquelle ces installations ne sont ni véritablement autorisées, ni véritablement interdites.

2- L’interdiction, sauf exception, au sein d’un bâtiment public

Ainsi, dans l’enceinte des bâtiments publics, l’installation d’une crèche de Noël est par principe interdite, sauf si certaines circonstances bien particulières permettent de lui reconnaître un caractère culturel, artistique ou festif, ou si cette installation résulte d’un usage local. Reste qu’il est particulièrement mal aisé de déterminer, concrètement, sur le fondement de ces critères, quel type d’installation serait susceptible d’être exceptionnellement autorisé. Hormis l’exposition des santons de Provence, qui semble être le seul exemple consensuel.

Quelle temporalité ? Il ne fait aucun doute qu’une première installation de crèche de Noël au sein d’un bâtiment public apparaît par principe irrégulière. Le tribunal administratif de Lyon l’a d’ailleurs jugé ainsi, s’agissant de l’installation d’une crèche de Noël au sein de l’hôtel de la région Auvergne-Rhône-Alpes (TA de Lyon, 5 octobre 2017, n°609063). Mais en dehors de ce cas, on peine véritablement à déterminer selon quelle temporalité l’installation d’une crèche de Noël deviendrait un usage local.

Jugements contradictoires. Le Conseil d’Etat a en effet jugé, s’agissant de la crèche de Noël installée au sein de l’hôtel de ville de Melun, qu’aucune circonstance particulière ne permettait de la juger légale, en dépit de sa présence récurrente au même emplacement depuis une vingtaine d’années.
A contrario, la cour administrative de Nantes a fait de cette installation réitérée, chaque année depuis 1990, un critère d’identification d’un usage local permettant de juger légale cette pratique au sein de l’hôtel du département de la Vendée (CAA Nantes, 6 octobre 2017, n°16NT03735).

Clarification attendue. La Fédération nationale de la libre pensée a toutefois annoncé qu’un pourvoi en cassation serait formé contre l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes, dont on peut espérer qu’il permette une explicitation des notions d’usage local et du caractère artistique, culturel ou festif de ces installations de crèches de Noël.

3- L’autorisation, sauf exception, dans les autres Emplacements publics

Dans les autres emplacements publics, notamment sur la voie publique, le principe est, en revanche, celui de la légalité de ces installations de crèches de Noël dès lors qu’elles ne constituent pas un acte de prosélytisme ou de revendication d’une opinion religieuse.

Fuir tout prosélytisme. L’application de cette règle paraît en l’occurrence moins périlleuse. Il semble donc admis, sauf à ce qu’elle apparaisse manifestement prosélyte, que l’installation d’une crèche de Noël dans un emplacement public d’une collectivité (à l’instar d’un lavoir notamment) ait vocation à être autorisée.

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