Coronavirus : les îles confrontées à l’afflux de Parisiens venus se « confiner »

Sylvie Luneau
Coronavirus : les îles confrontées à l’afflux de Parisiens venus se « confiner »

Pont d'Oléron

© Phovoir

La submersion de résidents secondaires venus de Paris et des grandes métropoles sur les îles est une des conséquences indirectes, autant qu’imprévues, du Covid-19. Comment les communes insulaires, leurs équipes et les habitants y font face ? Reportage.

Les images des gares parisiennes bondées et des Parisiens fuyant la capitale, suite à l’annonce du confinement par le Président de la République, ont marqué les esprits. Mais où sont-ils bien partis ? Beaucoup sont allés rejoindre leurs résidences secondaires. Aux premières loges : les îles. Bonne idée pour s’isoler ? Pas si sûr.

Les insulaires ont vu les volets s’ouvrir et les commerces alimentaires pris d’assaut pour remplir les frigos vides. « Avec ce grand soleil, les arrivants ont sorti les vélos, les surfs et les seaux, et sont allés à la plage, comme pendant les vacances » relate Joseph Hughes, directeur général des services de la communauté de communes de l’île d’Oléron. Plus sympa de se confiner en bord de mer que dans un petit appartement ! Effet indirect du Covid 19, que personne n’avait anticipé : les citadins ont dérogé aux règles leur imposant de rester chez eux.

Risque de surcharge sanitaire

 « Le confinement doit se faire à son domicile (au sein de sa résidence principale) et non pas dans une résidence secondaire. Il est très fortement déconseillé de chercher à rejoindre sa résidence secondaire au risque d’accélérer la diffusion du virus des régions infectées vers celles peu concernées. En ne respectant pas le confinement à son domicile principal, les personnes (…) font courir le risque de surcharge aux services d’urgences qui ne sont pas dimensionnés pour gérer un nombre de patients potentiels supplémentaires du fait d’un déplacement soudain de la population » exposait, dans un communiqué, la communauté de communes d’Oléron, qui ne dispose d’aucun hôpital pour les urgences. « Nous avons juste une maison médicale de garde. Nous allons devoir la renforcer pour accueillir les cas suspects de Covid 19. Ce poste de consultation avancé sera géré par l’ARS » expose le DGS.

Déchets : manque de personnels

Autre inquiétude : la gestion des déchets. « Avec l’afflux de résidents secondaires, nous allons devoir augmenter les rotations pour collecter les déchets ménagers. Comme les centres de tri sont à l’arrêt, la collecte sélective est aussi arrêtée. Nous espérons pouvoir compenser l’un par l’autre, car nous n’avons pas de personnel en réserve » s’inquiète le DGS. Pas évident, car l’été, pour assurer la collecte des déchets, l’effectif passe de 15 à 45 employés. L’île compte en effet 23 000 habitants et 20 000 résidences secondaires. Le problème est bien là : comment gérer l’afflux inattendu de personnes sans moyens humains supplémentaires ?

Même problème pour les forces de l’ordre, très peu présentes sur l’île hors saison. « Dans les premiers jours, nos quelques gendarmes ont vite été débordés. Ils ont concentré leurs efforts sur le contrôle des autorisations de déplacement sur le pont pour en limiter l’accès. Ils ont cependant rapidement reçu des renforts du continent » assure le DGS.

Mesures répressives

Vu la forte fréquentation des plages, les communes littorales ont dû prendre rapidement des arrêtés municipaux pour interdire leur accès. Le préfet maritime a par ailleurs interdit la pratique des activités nautiques.

Dans le Morbihan, l’un des premiers foyers épidémiques de France, où les établissements scolaires ont été fermés et les personnes des clusters confinées bien avant les autres, l’arrivée des citadins a été difficile. En particulier sur les îles qui ne comptent, pour l’instant, aucun cas de coronavirus. Dans un communiqué, la communauté de Belle-île-en-mer demandait dès le 16 mars aux résidents secondaires de ne pas venir « eu égard aux capacités de l’île », en particulier de l’hôpital local.

A Groix, un arrêté municipal a été pris le 17 mars pour limiter l’accès du bateau aux seuls insulaires. La région Bretagne, qui gère la desserte de l’île, a rapidement diminué le nombre de rotations de 5 à 2 et le nombre de passagers a été restreint à 100. Cette mesure a été appliquée à l’ensemble des îles bretonnes. Le préfet du Morbihan a également interdit les locations saisonnières de logements, du 18 au 31 mars, sur toutes les îles du département.

« Nous n’avons qu’une seule pharmacie et 2 médecins, en cas de problème sanitaire les rapatriements se font par canots de sauvetage. Nous ne sommes pas équipés pour accueillir des personnes potentiellement malades du coronavirus. D’autant que notre population est plus fragile, car plus âgée que la moyenne nationale » explique Dominique Yvon, maire de Groix, qui assure que la situation est rentrée dans l’ordre, depuis que ces mesures ont été prises.

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