Contractualisation : les grandes collectivités s’inquiètent de l’inflation !

Hugo Soutra
Contractualisation : les grandes collectivités s’inquiètent de l’inflation !

Budget, finances, calculette

© Flickr-CC-K.Teegardin

Le mécanisme de contractualisation budgétaire serait trop peu puissant pour réellement contraindre les collectivités à baisser leurs dépenses de fonctionnement, juge la Cour des Comptes dans son dernier rapport sur les finances locales. Mais, dans le même temps, France Urbaine et les grosses collectivités alertent sur la montée de l’inflation…Le grain de sable qui pourrait compromettre leurs engagements budgétaires.

77. C’est le nombre de contrats – émanant de ses adhérents (métropoles, communautés urbaines, communautés de communes et grandes villes) qui ont accepté de contractualiser avec l’Etat – que l’association France Urbaine a pu décortiquer en détails ces dernières semaines.

De cette analyse fine, ressort cinq urgences [lire l’encadré ci-dessous] et une évidence : l’inflation, non prévue, pourrait mettre en danger les engagements financiers pris par les grandes collectivités, d’autant plus que ces dernières, « mises au régime ces dernières années, n’ont plus de gras » insiste Franck Claeys, directeur Économie et Finances locales à France Urbaine.

Tenir ou subir

« Nous avons senti chez nos adhérents une véritable inquiétude concernant leurs capacités à maintenir leurs dépenses de fonctionnement en-dessous de la barre fixée dans leurs contrats » détaille ce conseiller de France Urbaine. Les appréhensions des grosses collectivités portent sur le bilan qui sera fait en 2020 et qui comparera l’évolution des dépenses entre les exercices 2019 et 2018 avec l’arrivée de l’inflation…

A l’entendre, le prochain rendez-vous avec l’État au printemps prochain, qui consistera à comparer l’évolution des dépenses de fonctionnement entre les exercices 2018 et 2017, risque d’être compliqué pour seulement une poignée de collectivités. Par contre, le suivant pourrait en revanche s’avérer beaucoup plus douloureux, selon ses sources. « La raison est que la loi de programmation, votée il y  a un an, imposant un taux de contrainte de + 1,2 % , ce qui équivalait peu ou proue à l’inflation…  malheureusement les nouvelles estimations sont différentes ; et en 2019, on devra s’attendre à une inflation sensiblement supérieure de 1,3% » expose Franck Claeys. « Et pour les collectivités, ces variations sont très clairement un enjeu, notamment pour tout ce qui relève des achats courants qui sont directement indexés sur l’inflation » analyse-t-il.

Inflation + dégel du point d'indice...

Une inflation « surprise » qui vient par ailleurs s’ajouter, pour ces grandes villes, à d’autres « dépenses contraintes » directement imposées par l’État aux collectivités. C’est le cas, par exemple, du dégel du point d’indice des fonctionnaires territoriaux relancé en 2019. « Il faut imaginer que pour les villes, la moitié des charges de fonctionnement correspondent à des dépenses de personnels » pointe Franck Claeys, avant de poursuivre : « Les craintes sont donc réelles pour les collectivités de dépasser les seuils maximums, lorsqu’il faudra au printemps 2020 comparer les exercices 2019 et 2018 ». D’autant, ajoute-t-il, que les marges de manœuvres sont aujourd’hui presque inexistantes après 3 années de baisse des dotations drastiques.

Au régime sec

« C’est comme lorsque vous faîtes un régime : une fois que vous avez bien maigri et atteint un certain poids, il devient dangereux de démultiplier les stratégies pour perdre encore quelques kilos de plus… car vous risquez sérieusement, cette fois-ci, de vous mettre en danger » assure le directeur des Finances Locales de France Urbaine. Des collectivités « sans gras » qui risquent pourtant des pénalités assez lourdes si elles ne parviennent pas à se maintenir en-dessous des taux fixés par les préfets.

Face à ces réalités « objectives », l’association propose donc au gouvernement « une clause de revoyure qui soit liée à l’inflation réelle ». Un « assouplissement » que ne semble absolument pas partager la Cour des Comptes, qui dans son dernier rapport épingle les contrats imaginés par le gouvernement, estimant justement, que ces derniers ne sont pas des outils assez puissants pour contraindre les collectivités à baisser leurs dépenses. La Cour préconise donc un retour… aux baisses de dotations !

Les 5 chantiers prioritaires de France Urbaine :

Tout faire pour ne pas revenir à l'ère de la baisse automatique des dotations. L’association d’élus France Urbaine compte profiter de l’examen du PLF 2019 pour améliorer le dispositif de contractualisation entre l’Etat et les grandes collectivités. Objectif : corriger ces imperfections pour que ce mécanisme perdure dans le temps. Parmi ces modifications, l'on retrouve cinq chantiers prioritaires :

  1. Neutraliser l’impact financier des dépenses et injonctions imposées par l’État comme les coûts induits par la scolarisation obligatoire dès 3 ans ;
  2. Retirer du périmètre des dépenses de fonctionnement les subventions versées à un syndicat ou un budget annexe lorsqu’elles sont destinées à des projets d’investissement ;
  3. Recourir à un tiers de confiance à la demande d’une ou des parties au contrat ;
  4. Déduire des interventions publiques cofinancées l’évolution des participations apportées, l’État ne retenant à l’heure actuelle que les dépenses en « brut » sans tenir compte les co-financements arrivés sous formes de mécénat ou sponsoring ;
  5. Neutraliser les flux croisés dans les recettes réelles de fonctionnement servant de base au plafonnement de la reprise.

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