Reçues successivement par le Premier ministre entre le 17 et le 30 juillet 2012, les associations d’élus ont plaidé pour leur participation active à la préparation du futur Acte III de la décentralisation, et ont avancé quelques dossiers prioritaires. La concertation se poursuivra en septembre.
Avant de réunir ses ministres, le 31 juillet 2012, pour un séminaire de travail consacré à la future loi « responsabilité et confiance » pour les territoires promise par François Hollande durant sa campagne, Jean-Marc Ayrault a reçu, tour à tour, les principales associations d’élus locaux. Chacune a pu présenter ses doléances, alors que le Premier ministre annonce un premier texte présenté « avant la fin de l’année 2012 » sur l’amélioration de la démocratie locale et les transferts de compétences.
Malgré tout, il fut assez peu question de ces compétences et de leur répartition, pourtant l’une des impasses de la loi de réforme territoriale impulsée par la précédente majorité.
Seule l’Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) semble avoir développé le sujet face au Premier ministre, réclamant « que la future loi de décentralisation clarifie et confirme le rôle économique et social des grandes villes et grandes agglomérations», selon un communiqué.
Selon la délégation des élus des grandes villes, conduite par le maire de Grenoble, Michel Destot, ce sont « des compétences partagées et non exclusives permettant un travail de coproduction entre les différents niveaux de collectivités locales et en particulier les régions » qu’il faut mettre en place. Il plaide pour des contrats de plan Etat-Régions qui « puissent être élargis à d'autres collectivités locales ».
Le futur Haut conseil des territoires pris d’assaut
Se félicitant pour la plupart d’un dialogue « renoué » avec l’exécutif, les associations d’élus ont surtout fait part au Premier ministre de leur volonté d’être associées à la rédaction du futur Acte III de la décentralisation.
L’Association des maires de France (AMF) « fera des propositions concrètes […] visant à clarifier les compétences et garantir la pleine autonomie et responsabilité des communes » (le communiqué de l'AMF).
Les président de régions (ARF), pour leur part, se disent « très attentifs à ce que la mise en œuvre de cette réforme soit à la hauteur de l’ambition portée par le président de la République en matière de décentralisation et de réforme de l’Etat » (communiqué de l'ARF).
En filigrane, c’est la représentation de chaque association d’élus au sein du futur Haut conseil des territoires, destiné à remplacer l’ancienne « conférence nationale des exécutifs » - qui n’avait pas brillé par la régularité de ses réunions -, qui semble se jouer. Avec pour enjeu l’influence de chaque association sur le contenu du futur projet de loi.
Tandis que la délégation de l’AMF menée par son président Jacques Pélissard plaidait pour que cette « instance pérenne de concertation » soit « créée et réunie le plus rapidement possible », d’autres associations d’élues qui n’avaient pas été reçues par le Premier ministre lui-même mais quelques jours plus tôt par son cabinet ou par d’autres membres du gouvernement, essaient également de se faire une place.
Ainsi, l’Association des petites villes de France (APVF) insiste sur « la nécessité d’une représentation spécifique des petites villes au sein de cet organisme » tout comme l’Association des maires ruraux (AMRF) qui souhaite « participer ès qualité au travaux » de ce futur Conseil.
Les normes, toujours et encore…
Autre dossier majeur porté par nombre des associations d’élus reçues : celui du poids des normes, déjà évoqué de manière récurrente par les élus locaux lors du quinquennat précédent. Se déclarant « prêts à apporter leur contribution à l’effort de maîtrise de la dépense publique », les élus de l’AMF estiment que « le gel des dotations ne peut se concevoir que s’il est mis un coup d’arrêt à la prolifération des normes législatives et réglementaires, faute de quoi la maîtrise des dépenses sera impossible ».
L’AMF demande que la compétence de la Commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) soit « élargie avec obligation d’avis conforme » et que « les projets de textes législatifs, d’origine européenne ou nationale, fasse l’objet d’une étude d’impact territorial préalable ».
Partageant ce constat, au point de dénoncer « l’incontinence normative », l’AMGVF assure que le Premier ministre « a reconnu que la CCEN, telle qu’elle existe, ne saurait suffire et qu’une mission dédiée serait effectivement souhaitable, laquelle devrait avoir alors un échéancier et produire un véritable résultat ».
Propositions pour la démocratie intercommunale
Par ailleurs, les élus ont abordé le dossier de l’intercommunalité, principalement les modes d’élection des conseillers communautaires.
L’AdCF milite pour une élection directe des conseillers communautaires en 2014.
L’AMGVF juge positif mais insuffisant en matière de démocratisation le fléchage des élus communautaires. « Ainsi, pourrait-il être envisagé un système mixte et progressif d’élection où une partie des conseillers communautaires serait élue au suffrage universel et l’autre par les conseils municipaux des communes membres de l’intercommunalité », proposent les maires de grandes villes.
Pour sa part, l’AMF réclame « qu’un projet de loi, définissant le mode de désignation des élus au sein des assemblées des établissements de coopération intercommunale, soit adopté en mars 2013, un an avant le scrutin municipal ».
D’autres priorités pour l’ADF
Ces rencontres ont permis à chacune des associations de plaider pour leur dossier prioritaire.
Ainsi, l’AdCF s’est-elle inquiétée de l’avenir des fonds du 1 % Logement, craignant « un nouveau désengagement budgétaire de l’Etat qui se traduirait pour [les intercommunalités] par une obligation de compensation ou l’abandon de certains programmes ».
Selon l’AMF, c’est le « processus législatif de création de l’agence de financement des collectivités qui doit être rapidement engagé »
L’ARF insiste sur le caractère « indispensable » de la future banque publique d’investissement.
Très discret sur ses échanges avec le Premier ministre concernant le futur projet de loi décentralisation, le président de l’Assemblée des départements de France (ADF), Claudy Lebreton, a préféré faire part de sa satisfaction devant la promesse, selon lui, de Jean-Marc Ayrault, de prochaines « mesures d’urgence » face aux difficultés financières des conseils généraux.
Aurélien Hélias