L’oeil sur les comptes
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136 comptes pour les départementales, 17 pour les sénatoriales, ont été rejetés par la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques (CNCCFP). La commission souhaite la mise en place de barèmes pour les prestations des experts-comptables et un encadrement de la mutualisation des dépenses par les partis.
Dix-sept comptes de campagne rejetés suite aux dernières sénatoriales (3,45% des comptes examinés). Et 136 comptes rejetés pour les départementales, soit 1,51% des comptes déposés dans les délais. Ces chiffres figurent dans le rapport d’activité de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP), présenté le 3 mai par son président, François Logerot.
Abus de dépense directe
Pour les élections sénatoriales du 28 septembre 2014, c’est la première fois que la CNCCFP examine les comptes. En effet, la loi du 14 avril 2011 a introduit l’obligation de dépôt des comptes, « par souci d’égalité entre les candidats » participant aux différentes élections, explique François Logerot.
Peu de dépenses de réunion publique, mais des frais de transport, de réception et d’imprimé. « Le résultat des contrôles est un peu meilleur que celui des autres élections », souligne le président : 56% d’approbation simple et 38% de réformation.
Sur les 17 comptes rejetés, 14 auraient pu prétendre à un remboursement. Mais pour 12 d’entre eux, « l’abus de dépense directe » a été fatal. Pour 4 autres, l’absence d’expert-comptable et une absence de mandataire financier expliquent les rejets.
Quatre invalidations d’élection par suite d’une saisine du Conseil constitutionnel « ont été mal vécu par le Sénat », reconnaît François Logerot. « Mais, ajoute-t-il, la règle est la même pour toutes les élections, et beaucoup de candidats sont des élus locaux qui ont déjà déposé des comptes de campagne ».
Difficile solidarité
Les élections départementales des 22 et 29 mars 2015 se sont traduites, pour la CNCCFP, par une augmentation du nombre de contrôles. La loi du 17 mai 2013 a en effet élargi la compétence de la commission aux cantons de moins de 9 000 habitants.
« Nous avons eu 6 mois pour examiner 9 074 comptes. Nous avons relevé le défi », se félicite le président. Le principe de solidarité des binômes, « un seul compte, un seul mandataire, un seul remboursement », n’a pas été toujours bien compris ni respecté, relève-t-il.
Le poste de dépense des départementales le plus affecté par les réformations, avec 1,4 million d’euros, est celui des frais d’impression et de publication, principalement du fait de l’exclusion des dépenses de la campagne officielle lorsqu’elles sont inscrites par erreur dans le compte de campagne.
Près du quart des intérêts d’emprunt comptabilisés par les candidats ont fait l’objet d’une réformation, afin de parer à tout risque d’enrichissement sans cause. Au total, le remboursement forfaitaire de l’Etat s’est élevé à 49,67 millions d’euros, soit 90% de l’apport personnel déclaré.
Le problème des honoraires d’experts-comptables
Quelques problèmes plus fréquents ont été relevés. Ainsi du montant, souvent très élevé, des honoraires des experts-comptables, auxquels tous les candidats doivent recourir pour la présentation des comptes, sauf s’ils n’ont ni recettes ni dépenses.
La commission accepte donc, logiquement, que ces dépenses soient remboursables. « Mais des experts-comptables présentent des notes déraisonnables », déplore le président, qui cite un cas où il s’agit de la seule dépense !
Si la disproportion est trop importante par rapport aux dépenses, cette ligne est réformée aux dépens du candidat. Il s’agit en fait, pour la commission, d’alerter l’ordre des experts-comptables et d’obtenir que la profession indique un barème ou accepte que les honoraires soient fixés un fois le montant des comptes connus.
Mutualisation et emprunt
Autre problème : la tendance croissante des partis à mutualiser les dépenses des candidats. « Ce n’est pas interdit par la loi, mais suppose que la commission dispose d’éléments justificatifs de dépenses pour chaque candidat », précise François Logerot. Le parti ou les fournisseurs « ne doivent pas faire de bénéfice sur le dos des candidats », et les critères de répartition entre les candidats doivent être clairs. Dans le collimateur : le microparti Jeanne, créé par le FN, et son fournisseur Riwal.
Dernier souci pour la commission : la place de l’emprunt dans le financement de la vie politique. Aucune disposition ne limite les montants ou l’origine des prêts souscrits par les candidats. Cependant, la question de l’origine des fonds et de la réalité des remboursements peut se poser alors que la commission ne peut les contrôler.
La CNCCFP a bien accès, depuis la loi du 11 octobre 2013, au bilan des cinq postes de dette prévus au bilan des comptes d’ensemble, mais aucune sanction n’est prévu en cas de non production des pièces.