Communes nouvelles : pourquoi un tiers des départements sont encore réfractaires

Aurélien Hélias
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Alain - 23/05/2016 21h:17

Venant de créer une commune nouvelle sur la base de 3 anciennes et regroupant 10 000 habitants , nous ne pouvons après 6 mois d'existence qu.etre satisfaitsC'est un peu comme si on avait "mis un moteur neuf" et "change de carburant"De nouvelles opportunités se font jour , tant au niveau organisationnel qu'en matière d'investissements Les écarts entre les collectivités vont se creuser si çe sont les communes les plus dynamiques qui se regroupent.....

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Communes nouvelles : pourquoi un tiers des départements sont encore réfractaires

Décentralisation, territoires

© BM

Si les créations de communes nouvelles se sont multipliées en 2015 et au premier trimestre 2016, 34 départements n’en dénombrent encore aucune. Les raisons d’une telle prudence, voire du scepticisme des élus dans ces territoires, sont variées, à entendre les sénateurs Françoise Gatel et Christian Manable, auteurs d’un rapport sur « la révolution silencieuse » des communes nouvelles.

C’est la rançon du succès : avec 317 communes nouvelles crées à ce jour, alors qu’elles n’étaient encore que 25 au 1er janvier 2015, comment une telle accélération de leur création a-t-elle pu être ignorée par près d’un tiers des départements ? Car mi-mai, 34 départements sur 102 sont encore vierge de toute commune nouvelle, dont 28 en France métropolitaine.

Dans un rapport provisoire réalisé au nom de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales, dont la version finale sera dévoilée au congrès des maires, Françoise Gatel et Christian Manable égrènent d’abord quelques-uns des ingrédients qui ont amené à cette « révolution silencieuse apaisée, permettant de garder l’efficacité de l’action publique sur le territoire », selon la sénatrice d’Ille-et-Vilaine.

Une loi portée par les élus, via l’AMF, des maires qui enclenchent eux-mêmes le projet de fusion : autant d’éléments primordiaux expliquant le succès de la commune nouvelle. Et ce particulièrement dans :

  • la Manche (36 communes nouvelles),
  • le Maine-et-Loire (25),
  • l’Orne (20),
  • l’Eure (18)
  • et le Calvados (15).

« De 357 communes à 250 en Maine-et-Loire, soit moins 30% : c’est une frénésie ! », se réjouit ainsi la sénatrice, qui loue la promotion faite sur place par la préfète.

Une "diagonale du vide" et un arc méditerranéen en retrait

Mais aux côtés des régions « championnes » (Normandie, Pays de la Loire, ex-Rhône-Alpes et Alsace), apparaissent des territoires moins allants. Sur certains, l’explication s’avère assez arithmétique : « En Bretagne, il n’y a pas pléthore de communes nouvelles, alors que la région était déjà en pointe sur l’interco. C’est parce que le territoire a peu de petites communes de moins de 100 habitants, notamment en Ille-et-Vilaine », témoigne Françoise Gatel.

Mais le mystère s’épaissit au regard de départements n’abritant encore aucune de ces communes nouvelles dans une « “diagonale du vide” Nord-Est / Sud-Ouest » observe Christian Manable, auquel il faut ajouter l’Ile-de-France, la quasi-totalité des départements du littoral méditerranéen, la Corse et les Dom.

« C’est parfois dans des départements où on a le plus besoin qu’il y a le moins de communes nouvelles, se désespère le sénateur. Avec 782 communes, la Somme est le troisième département français avec le plus de communes… la ruralité qui y est prépondérante aurait bien besoin de cette mutualisation des moyens. 117 communes de moins de 100 habitants pour la Somme : le dilemme pour elles, c’est mourir seules ou vivre ensemble », assène-t-il.

Jugement similaire porté par Françoise Gatel sur ces 34 départements vierges de toute commune nouvelle génération. « Notamment certains dans lesquels on aurait pu penser que c’était une opportunité dont les élus auraient pu se saisir, là où il y a de toutes petites communes rurales confrontées à des problèmes d’efficacité », renchérit la maire de Châteaugiron.

Les impératifs de la loi Notre s'imposent au calendrier

Dans ces départements aux nombreuses petites communes, les raisons de ce statu quo peuvent être variées à écouter les deux élus. « Là où il n’y a pas d’habitude de travailler ensemble, dans le cadre intercommunal, là où il n’y a pas de projet d’envergure, cela explique que les élus locaux ne se saisissent pas cette nécessité », analyse Christian Manable.

Dans d’autre cas, c’est le sentiment de ne pas avoir le mandat pour une telle « révolution » institutionnelle locale qui incite les élus à rester en retrait. « Des maires disent “on n’a pas été élus pour ça, ce n’était pas dans notre programme ! On attendra la prochaine fois” », relate l’élu de la Somme.

Par ailleurs, certains projets seraient déjà en cours de réalisation si une autre réforme d’importance, celle portée par la loi Notre, n’avait pas imposé en même temps une révision importante des périmètres intercommunaux.

« Il n’y a pas eu d’harmonisation du calendrier des dispositions législatives sur les communes nouvelles et de la loi Notre. Le calendrier très serré de la loi Notre a parfois gelé des projets de création de communes nouvelles parce que les préfets, là où il y avait des révolutions intercommunales, ont avancé l’impératif de la construction d’interco de plus de 15 000 habitants », témoigne Françoise Gatel. Dans ces départements, il s’agirait donc d’une question de mois pour relancer ces projets de communes nouvelles, après que les SDCI auront été définitivement fixés.

Des départements très discrets

Dernier élément contribuant à l’absence de mouvement favorable aux communes nouvelles dans un tiers des départements : l’absence de tout rôle proactif des collectivités départementales. « Il n’y a pas beaucoup d’implication des conseils départementaux », consent Christian Manable.

« Je n’ai pas connaissance de départements qui prennent l’initiative, appuie Françoise Gatel. Mais la démarche des communes nouvelles se fait en dehors de la loi Notre », s’empresse-t-elle d’ajouter.

Pourtant, les départements, premiers partenaires financiers des petites communes rurales, auraient intérêt à une certaine rationalisation de la structuration du bloc communal pour éviter tout saupoudrage de leurs subventions. « Ils seront bien obligés, avec les dispositifs d’aide aux territoires, de prendre en compte ces communes nouvelles dans leur aménagement du territoire », confirme Christian Manable. Qui préconise d’aiguillonner leur création vers un modèle « de regroupement avec le bourg centre, voire la ville centre », plutôt que de regroupement d'« un petit nombre de communes rurales ».

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