Répartir les sièges
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Une élection municipale intégrale ou partielle intervenue depuis le 20 juin 2014 entraîne la remise en cause de l’accord amiable local sur la répartition des sièges communautaires.
Analyse de jurisprudence, par Anne Gardère, avocat au barreau de Lyon — Le Courrier des maires a le plaisir de vous offrir la lecture de cet article publié dans son n°283, d’octobre 2014.
Par une décision du 20 juin 2014 (Conseil constitutionnel, Commune de Salbris, QPC n° 2014-405), le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions de l’article L.5211-6-1 I § 2 du CGCT qui permettaient de procéder à une répartition amiable des sièges entre les communes membres d’un EPCI à fiscalité propre.
Toute nouvelle élection municipale totale ou partielle intervenue après le 20 juin 2014 (cas loin d’être hypothétique compte tenu des contentieux électoraux) entraînant l’obligation de procéder, dans la CC ou la CA concernée, à une nouvelle répartition des sièges suivant la méthode légale basée sur la seule population, se pose ensuite, lorsque cette opération induit une diminution ou une augmentation de sièges pour une commune, la question du mode de désignation.
Face au silence des textes, et dans l’attente de précisions de l’Etat, il n’existe guère d’autre solution que d’appliquer les dispositions de l’article L.5211-6-2 du CGCT, qui prévoient les modalités d’élection des conseillers communautaires entre deux renouvellements. Attention également aux exécutifs communautaires dont le mandat pourrait être remis en cause (notamment si la commune d’origine du président perd des sièges), avec les diverses conséquences induites (séance d’installation, nombre de vice-présidents, délégations diverses et enveloppes indemnitaires à revoir…).
Affaire à suivre attentivement, donc, par les CA et les CC, de même que la proposition de loi du 3 septembre 2014 permettant un accord amiable local modulant le nombre de sièges sur une fraction limitée de ceux-ci pour respecter la jurisprudence constitutionnelle !
Les circonstances du litige
Mettant en œuvre les dispositions de la loi RCT dans le cadre des élections de mars 2014, la commune de Salbris, membre de la communauté de communes de la Sologne des rivières pouvait espérer bénéficier de 13 sièges sur 27 avec une représentation strictement démographique, basée sur l’article L.5211-6-1 II du CGCT, suivant le mécanisme légal de la répartition des sièges à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, en fonction de la population de chaque commune membre, appliqué à un nombre de sièges prévu par un tableau au prorata de la population totale de l’EPCI-FP.
Pour autant, alors même qu’il s’agit de la commune la plus peuplée de l’EPCI, elle se retrouve in fine avec seulement 7 sièges sur 27, suite à un accord amiable, rendu possible au sein des communautés de communes (CC) et d’agglomération (CA) par l’article L.5211-6-1 I § 2 du CGCT, les communes pouvant, à la majorité qualifiée, augmenter de 25 % le nombre de sièges et répartir ceux-ci en « tenant compte » simplement de la population, permettant donc de s’éloigner du strict critère démographique.
Constaté par le préfet dans un arrêté du 22 octobre 2013, ce mode de répartition amiable est contesté par la commune de Salbris devant le TA d’Orléans, au motif qu’il porterait atteinte au principe constitutionnel de l’égalité du suffrage. Transmise par le TA au Conseil d’Etat, ce dernier considère cette question prioritaire de constitutionnalité comme sérieuse et la renvoie derechef au Conseil constitutionnel (CE, 11 avril 2014, n° 375278).
Une censure pour violation du principe d’égalité devant le suffrage
Le Conseil constitutionnel commence par rappeler (consid. n° 4), que, dans la mesure où les EPCI exercent, en lieu et place de leurs communes membres, des compétences qui leur auraient été autrement dévolues, « leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques ». La répartition des sièges doit ainsi respecter un principe de proportionnalité par rapport à la population de chaque membre, même s’il peut être tenu compte, mais « dans une mesure limitée », « d’autres considérations d’intérêt général et notamment de la possibilité qui serait laissée à chacune de ces collectivités de disposer d’au moins un représentant au sein de cet organe délibérant ».
Le Conseil analyse ensuite (consid. n° 6) la disposition contestée, et observe que la possibilité de l’accord amiable intervenu entre les communes sur le nombre et la répartition des sièges au conseil, se borne à imposer qu’il soit juste « tenu compte » de la population : la disposition législative contestée déroge ainsi de manière « manifestement disproportionnée » au principe de proportionnalité par rapport à la population de chaque commune membre de l’EPCI, ce qui induit la censure, pour inconstitutionnalité, de l’article L.5211-6-1 I § 2.
Des conséquences draconiennes pour les CC et CA qui ont à appliquer la décision
1/ Très logiquement, la déclaration d’inconstitutionnalité bénéficie à la commune requérante.
2/ La disposition censurée ne peut être appliquée dans toutes les instances contentieuses en cours à la date du 20 juin 2014, date de publication de la décision.
3/ De même (consid. n° 8), tout accord amiable est exclu pour les opérations de fixation du nombre et de la répartition des sièges de conseillers communautaires réalisées après le 20 juin 2014.
4/ Enfin et surtout (consid. n° 9), si le Conseil considère qu’une remise en cause immédiate des accords amiables pour toutes les communautés de communes et d’agglomération entraînerait des « conséquences manifestement excessives », il entend néanmoins assurer son plein effet à sa décision. Dès lors, afin de préserver l’égalité devant le suffrage, il pose le principe de la remise en cause du nombre et de la répartition des sièges dans les CC et CA pour lesquelles le conseil municipal de l’une des communes membres serait partiellement ou intégralement renouvelé après le 20 juin 2014.
Gervais Hugues - 13/04/2019 15h:48
commune de 1000habitants et plus . Une liste ayant 2 élus municipaux et 1 communautaire . L'élu 1° démissionne ,remplacé par le 2°suivant, le 1° ayant refusé. Qui siège à la COM COM ? les 2 élus étant de sexe opposé a l'élus démissionnaire ? Le 1°de la liste peut il siéger ? Merci.
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