Cahors et Senlis, itinéraires de deux communes engagées dans la revitalisation de leurs cœurs de ville

La rédaction
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kuidam - 05/04/2016 09h:44

Je connais bien Senlis. A force de risquer une amende pour stationnement et maintenant pour avoir roulé à 25 km/h autant aller à st maximin là il y a tout contrairement à Senlis et en plus on peut se garer gratuitement. c'est sur c'est joli senlis, mais ca ne vaut pas la peine de prendre une sanction pécunière et évenuteullement une perte de points pour faire ses courses

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Cahors et Senlis, itinéraires de deux communes engagées dans la revitalisation de leurs cœurs de ville

Cahors (Lot)

© Flickr

Comment redynamiser les cœurs de villes délaissés par des habitants et des commerçants ayant cédé aux sirènes de la périphérie ? Entretien croisé avec Jean-Marc Vayssouze-Faure et Pascale Loiseleur, respectivement maires de Cahors (Lot, en photo) et de Senlis (Oise).

Jean-Marc Vayssouze-Faure et Pascale Loiseleur, respectivement maires de Cahors (Lot) et de Senlis (Oise), reviennent sur leur projet de cœur de ville. Circulation automobile, logement, gestion de secteurs sauvegardés et du bâti, et partenariat avec les commerçants... : les élus tiennent compte de toutes les données de l'attractivité locale.

Le Courrier des maires : Dans quelle situation se trouve le cœur de ville de votre commune ?

Jean-Marc Vayssouze-Faure : Le centre-ville médiéval de Cahors est en secteur sauvegardé. Il est passé de 7 500 habitants à 3 000 en une vingtaine d'années. Depuis le début des années 2000, le chiffre de la population se stabilise, mais on compte environ 600 logements vacants. Le centre est délabré et concentre beaucoup de personnes vulnérables et isolées. La moitié environ de sa population vit en dessous du seuil de pauvreté. Il y a aussi un déséquilibre générationnel avec de moins en moins de familles et de population active. Quant au commerce, même si les choses sont en train de se rééquilibrer, il a beaucoup souffert de la concurrence des installations en périphérie.

Pascale Loiseleur : L'hypercentre est un secteur sauvegardé de 30 hectares. La population y est encore mixte socialement, mais je reçois de plus en plus de personnes qui déplorent la vétusté de leur logement. Par ailleurs, Senlis présente une relativement bonne mixité des commerces et un taux de vacance des locaux commerciaux encore faible, autour de 5 % en 2015. Toutefois, on sent une certaine fragilité. Les médecins notamment, certains commerçants aussi, ont du mal à se maintenir en centre-ville. Je dirais que nous ne sommes pas tant dans la nécessité de redynamiser notre centre-ville que dans celle d'empêcher sa perte de dynamisme.

Quelles politiques menez-vous dans le domaine de la circulation ?

P. L. : Nous voulons redonner la priorité aux piétons en réduisant la place de la voiture en centre-ville, même s'il n'est pas question de "piétonisation" totale. Nous avons mis en place une zone de rencontre à 20km/h et instauré des navettes en minibus qui relient les quartiers périphériques au centre-ville, ce qui fonctionne d'ailleurs très bien.

Parallèlement, nous avons lancé une étude pour réviser la gestion du stationnement à l'échelle de Senlis. Comme dans de nombreuses villes, il s'agit d'éviter les voitures ventouses ou encore l'utilisation par les commerçants et leurs employés des places de parking situées devant leur boutique, afin de favoriser la rotation du stationnement.

J.-M. V.-F. : A Cahors, nous essayons également de faire sortir la voiture du centre-ville, sans l'exclure totalement, et de faciliter la rotation du stationnement là où les automobilistes pourront circuler. Nous installons des parkings relais en périphérie, qui permettent l'accès rapide au centre-ville à pied, en vélo – avec un garage fermé où l'on peut garer sa voiture et son vélo – ou avec une navette. Dans ce domaine, il faut avoir une approche progressive.

Comment gérez-vous le caractère patrimonial de vos centres-villes, tous les deux en secteur sauvegardé ?

P.L. : Les exigences qualitatives en termes de façades commerciales, d'enseignes et d'entrée de ville liées au statut du centre-ville participent de son attractivité. Nous en sommes convaincus. Mais nous savons aussi que c'est difficile pour certains commerçants d'investir dans la modernisation de leur boutiques tout en respectant les normes, notamment dans le domaine de l'accessibilité. Dans la configuration d'un centre-ville classé, avec des voies pavées partout, il est par exemple interdit d'installer des rampes d'accès. Par conséquent, même s'ils améliorent l'accès à leur local, commerçants et professions libérales de Senlis doivent en passer par des demandes de dérogations. Bien qu'il soient en ce sens soutenus par l'Architecte des bâtiments de France, leurs demandes sont régulièrement refusées. C'est démoralisant, je le vois bien. Et c'est ce qui les pousse vers la périphérie. Il y a un important travail à faire avec les services de l'Etat pour trouver un compromis.

J.-M. V.-F. : La rénovation du bâti et de la voirie est un grand axe de la politique de revitalisation du centre-ville de Cahors. D'ici la fin du mandat, toutes les rues du centre-ville seront rénovées. Nous aidons par ailleurs à la rénovation des façades, avec un système de subventions proportionnelles à la complexité de l'opération. C'est un investissement qui n'est pas simple à gérer car, par définition, tant que les façades ne sont pas "décroûtées", il est souvent impossible de se prononcer sur l'ampleur réelle des travaux à engager.

A Cahors, vous portez un programme assez original dans le domaine du bâti et du logement. Comment le décririez-vous ?

J.-M. V.-F. : Nous avons mis en place différents dispositifs tels qu'une taxe sur le logement vacant, des primes à la fusion des logements pour s'adapter aux besoins des familles, la préemption, etc., qui sont aujourd'hui dans les mains d'une SEM que nous avons chargée, dans le cadre d'une concession publique d'aménagement de 10 ans, de racheter des logements, de les réhabiliter (avec notre soutien financier) et de les remettre sur le marché.

Parallèlement, nous investissons dans l'innovation et la recherche. Le bâti ancien a des propriétés énergétiques certaines, mais il présente l'inconvénient de pas pouvoir être rénové selon les moyens classiques. On ne pose pas du double vitrage en PVC sur une façade classée ! Pour améliorer les dispositifs de rénovation thermique, nous sommes engagés dans trois programmes.

  • D'une part, nous développons de l'information et des formations spécialisées à l'attention des artisans et architectes locaux, en partenariat avec les chambres consulaires et des cursus diplômants déjà présents à Cahors.
  • D'autre part, nous avons recruté une doctorante spécialisée dans l'écorénovation dans le cadre d'une convention industrielle de formation par la recherche.
  • Enfin, nous accueillons des startups qui souhaitent tester ou créer —à partir de nos données — des modèles numériques d'amélioration de l'efficacité énergétique du bâti médiéval.

Quelles actions sont possibles pour améliorer le cadre de vie et le dynamisme économique de centre-ville ?

P.L. : Nous tâchons de développer des animations dans le centre-ville, en partenariat avec les commerçants. Depuis quatre ans, un festival de théâtre se déroule dans la rue, dans des commerces et dans les musées. En 2015, une enveloppe exceptionnelle a été débloquée pour subventionner de nouvelles actions. Nous venons de finaliser un nouveau cadre règlementaire pour le droit de terrasses.

Le tourisme est aussi un grand chantier pour la commune. Senlis a un fort potentiel, mais elle reste pour l'instant un lieu de passage et non de séjour. Nous comptons sur des équipements tels que le musée d'art et d'archéologie, dont la réhabilitation vient de se terminer, ou encore l'église Saint-Pierre, en cours de rénovation, qui va accueillir des manifestations culturelles.

Depuis juillet 2015, nous sommes ville d'art et d'histoire. Plus globalement, nous souhaiterions engager un partenariat avec des villes voisines afin de développer le tourisme dans la région.

J.-M. V.-F. : L'amélioration du cadre de vie du centre-ville passe évidemment par tout le travail de rénovation et de circulation/stationnement, mais pas uniquement. Nous avons travaillé à l'amélioration de tranquillité publique, avec l'installation de la vidéosurveillance. Nous organisons des animations également. Quant au commerce, nous agissons sur les conditions d'installation en périphérie, qui sont strictes. Seules les surfaces qui ne peuvent pas s'installer en centre-ville y sont désormais tolérés. Pour lutter contre la vacance des locaux commerciaux, nous avons testé la préemption urbaine sur les pas de porte, mais, juridiquement, c'est complexe.

Nous travaillons en parallèle à des plates-formes numériques de type "Click and Collect"((Click and Collect : service proposé aux consommateurs leur permettant de réserver ou de commander des produits en ligne avant de les retirer directement dans une boutique.)) pour favoriser le commerce et l'artisan de proximité. Sachant que c'est la présence de services qui attire aussi les habitants vers le centre et ses commerces, nous tâchons d'installer tout nouvel équipement (sportif, culturel, de santé, etc.) en centre-ville. Un cinéma multisalle doit d'ailleurs s'y installer prochainement.

Les villes moyennes, réunies dans l'association Villes de France, s'attaquent depuis plusieurs années à la dévitalisation des centres-villes. Plusieurs d'entre elles ont exposé leurs actions, à l'occasion du "Rendez-vous de l'intelligence locale" organisé le 15 mars 2016 sur ce thème.

>> Lire aussi : Le manifeste des villes moyennes pour réinvestir leurs centres-villes 

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