Stéphan Rossignol, bâtisseur, contre vents et marées

Aurélien Hélias
Stéphan Rossignol, bâtisseur, contre vents et marées

Stéphan Rossignol, maire de La Grande-Motte (Héraut)

Cinquantenaire, la station balnéaire, célèbre pour ses "pyramides", a présenté le 8 avril un vaste projet de réaménagement urbain mêlant extension portuaire, création de logements et espaces publics repensés. Un projet de "Ville-port" porté et soutenu bec et ongles face aux critiques par le maire (LR) de la cité héraultaise, Stéphan Rossignol. Portrait.

[Portrait initialement publié dans le Courrier des maires n°324-325, juillet 2018]

Qui a dit que La Grande-Motte était moche ? A la question posée par « Télérama » en 2010, Stéphan Rossignol s’est fait fort de pouvoir répondre un jour : plus personne. « Ça n’a pas toujours été simple de dire que j’étais élu de La Grande-Motte », se souvient ce Cévenol, entré au conseil municipal en 2001. « Combien de fois me suis-je entendu répondre “pas de bol”, “c’est affreux”, eu égard à l’image déplorable de la ville. » Vexé, mais jamais découragé, l’élu répondait vivement à ses interlocuteurs qu’ils n’avaient rien compris ! Maire depuis dix ans, il s’est fait l’avocat de sa ville longtemps comparée à Sarcelles et décriée pour le tourisme de masse auquel elle fut dédiée. Et son VRP aussi : ce « franc-parleur » aime rappeler que « dans le monde, trois architectes ont conçu une ville de A à Z, Oscar Niemeyer à Brasilia et Le Corbusier à Chandigarh, en Inde. Le troisième, c’est Jean Balladur, un visionnaire qui, avec La Grande-Motte, a construit une ville d’avant-garde, à nulle autre pareille. »

Faire aimer le béton pour les 40 ans à venir : tel fut donc l’objectif du premier mandat. « Avec un tel patrimoine, il fallait vendre une autre image, repenser la cité aussi », évoque le premier magistrat. L’homme la connaît parfaitement, depuis qu’enfant, il a été impressionné par cette cité nouvelle en chantier, où il venait se balader, depuis Ganges, avec ses parents.

Ville hors norme. Celui qui a débuté sa carrière politique à 12 ans en collant des affiches de Giscard, puis en militant au RPR cinq ans plus tard, apprivoise La Grande-Motte au gré de trois jobs d’été successifs. « J’en ai passé deux au cadastre à sillonner tous les quartiers pour numéroter les nouvelles maisons, contrôler. » Après avoir été membre du cabinet de Jacques Blanc, président de la région Languedoc-Roussillon, Stéphan Rossignol devient conseiller régional en 1998 - il fut même vice-président de la région, au moment où son mentor est réélu avec les voix des conseillers FN. Sa première campagne municipale, il la vit en 2001 lorsqu’il s’oppose au maire DVD Henri Dunoyer qui a remplacé le maire RPR précédent, Serge Durand, incarcéré pour détournement de fonds.

[caption id="attachment_81243" align="alignleft" width="300"] La Grande-Motte, Héraut[/caption]

L’avenir de la station, il a pu y réfléchir pendant sept ans, dans l’opposition. Le temps d’appréhender de l’intérieur les dossiers majeurs, de monter une équipe et de préparer un projet pour redorer l’image de la ville. « Jusque-là, on répondait au coup par coup à sa croissance démographique », évoque cet aménageur volontariste. Elu maire en 2008, au 2tour, avec 52 % des voix face à Henri Dunoyer, il lance un schéma directeur de modernisation de la station. « Il a une vraie vision pour sa ville, qui se repliait sur elle-même alors que c’est un joyau », confie Christian Biecher, l’architecte urbaniste parisien qui a conçu le schéma. Afin que cette cité, dessinée pour les vacances, entre dans une logique de ville durable à part entière. « Le maire est parti de zéro, une démarche municipale rare », ajoute l’architecte qui évoque les séances jamais simples pour convaincre la population, le travail avec des élus peu expérimentés et le torpillage du dossier par un adjoint à l’urbanisme. « Stéphan Rossignol a maintenu le cap. »

Au même moment, tout à son obsession de renverser le regard négatif posé sur l’architecture décriée de la ville, l’édile rencontre le directeur régional des affaires culturelles. « J’ai eu la chance qu’il apprécie l’œuvre de Balladur », se félicite-t-il. En 2010, la ville est labellisée Patrimoine du XXsiècle. « Dans sa totalité, précise fièrement le maire. Cette première nationale a été le déclencheur de tout. » A l’office de tourisme, Jérôme Arnaud, directeur de la station, constate que « l’image s’est quasiment inversée. Cette ville hors norme, a besoin d’ambition, d’audace et ce maire n’a pas peur de bousculer ». Les résultats suivent : La Grande-Motte est à la mode dans les médias nationaux. Les architectes reviennent s’en inspirer, des symposiums sont consacrés à cette « cité jardin » encensée désormais pour ses - fort coûteux - 70 % d’espaces verts. La ville a plusieurs fois connu les honneurs de la Cité de l’architecture de Paris. Puis, c’est l’ancrage du Salon international du multicoque. « Je suis allé le chercher avec les dents au salon nautique de Paris contre l’avis de mes élus qui n’étaient pas chauds, c’était trop élitiste ! » raconte l’édile.

« Bétonneur » ? Réélu en 2014 au premier tour avec 54 % de voix, celui qui se veut maire bâtisseur assume, contre vents et marées, son projet « Ville-Port ». Cette grosse opération de réaménagement urbain allie jusqu’à 2026 extension portuaire et création de cinq cents logements prolongeant la grande Pyramide. « C’est un promoteur bétonneur dont le projet de densification du port va être préjudiciable à l’œuvre de Balladur », conteste Sylvie Berger, élue d’opposition, tête de liste DVD au dernier scrutin. « Le maire s’autosatisfait de sa gestion depuis dix ans, mais ses prédécesseurs aussi se sont attelés à modifier l’image de la ville. »

Habitué des chantiers au long cours, l’édile ne baisse pas pavillon. On lui promet des coups, dans ses prochaines consultations publiques, déjà. « Ce grand projet est fondateur. Sinon quel est l’avenir d’une ville qui n’a plus de perspective de développement ? » A défaut d’un destin national, celui qui a soutenu jusqu’au bout François Fillon en 2017 se focalise désormais sur la réussite de son programme urbain haut de gamme. Avec bon espoir de l’inaugurer à la fin d’un troisième mandat, en 2026.

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