Les remboursements de frais renvoient à des cas très particuliers. Le logement de fonction reste réservé aux présidents de département et de région. L’encadrement des avantages par l’assemblée délibérante est recommandé.
Condamnés par certains, justifiés pour d’autres, les avantages en nature des élus locaux sont à la fois peu utilisés et peu encadrés. Ainsi en va-t-il des appartements de fonction : "Il y en a peu réservés aux élus, exceptés pour les présidents de conseils régionaux et généraux et les maires des très grandes villes. La mise à disposition d’un logement de fonction en faveur d’un élu n’est possible qu’en référence notamment à la nécessité absolue de service. Comme il n’existe qu’une réglementation imparfaite, au contraire de celle visant les fonctionnaires territoriaux, il faut aussi se référer à la notion d’intérêt régional ou départemental", expose Bernard Poujade, professeur agrégé des facultés de droit.
En la matière, la loi s’avère beaucoup plus rigoureuse pour les fonctionnaires territoriaux : "La transparence existe car les délibérations des assemblées délibérantes dressent la liste des emplois pour lesquels les logements de fonction peuvent être attribués", rappelle l’avocat au barreau de Paris.
Progrès législatifs
Même la bonne volonté du législateur ne suffit pas toujours pour encadrer correctement la pratique des élus. "La loi du 27 février 2002 a introduit dans le CGCT des éléments pour sécuriser l’utilisation de logements de fonction dans des conditions très strictes, “lorsque la résidence personnelle du président du conseil général ou régional se situe en dehors de l’agglomération comprenant la commune chef-lieu du département ou de la région”. Mais les progrès textuels n’empêchent pas les contentieux", constate Bernard Poujade. Seule avancée juridique certaine : les maires sont de facto exclus de ce dispositif étant donné qu’ils doivent résider dans leur commune d’élection.
Malgré une possibilité restreinte d’utilisation de ces logements, les présidents de conseils généraux ou régionaux peuvent en profiter dans des conditions plus intéressantes que les préfets, dont les "logements de fonction sont fiscalisés selon un classement par catégories", rappelle le député René Dosière, pourfendeur infatigable de l’utilisation abusive de l’argent public par les élus de la République. "Il ne serait pourtant pas compliqué de créer une grille forfaitaire pour fiscaliser ces avantages en nature", estime-t-il.
A l’inverse, les locataires de ces logements de fonction doivent aussi prendre garde "à la mise à disposition de personnels de service ou d’entretien de ces logements qui doit donner lieu à des marchés publics pour assurer ce type de prestations, ce qu’a rappelé la jurisprudence de la cour administrative d’appel de Lyon dans le dossier Millon", rappelle Bernard Poujade.
Par ailleurs, de nombreux frais, comme ceux relatifs aux déplacements, peuvent faire l’objet de remboursements. Les conseillers municipaux bénéficient ainsi du remboursement de leurs frais de transport et de séjour pour participer à des réunions dans les organismes où ils représentent la collectivité. Idem pour les conseillers régionaux et généraux (alors destinataires d’une somme forfaitaire) et les conseillers intercommunaux non bénéficiaires d’une indemnité de fonction pour les réunions qui n’ont pas lieu dans leur commune.
Missions exceptionnelles
Autres remboursements de frais de déplacement possibles : ceux résultant de l’exécution d’un mandat spécial qui suppose une "mission exceptionnelle", distincte des missions habituelles de l’élu local, limitée dans le temps. Les remboursements se font sur justificatifs, sans possibilité de verser une somme globale avant ou après. Subordonnés au vote d’une délibération, ils sont bien loin de l’image fantasmée de la voiture de fonction attitrée avec chauffeur "même s’il existe au niveau des grandes collectivités des pools de voitures disponibles", souligne Jacques Ferstenbert, avocat spécialiste de droit public.
Une faille existe cependant dans l’encadrement de cet avantage : "Si une délibération de l’assemblée est nécessaire pour acheter des voitures, c’est le plus souvent l’exécutif seul qui décide des bénéficiaires", regrette René Dosière.
Le député estime d’ailleurs "qu’à l’inverse des élus nationaux, dont les avantages annexes sont connus - carte SNCF, forfait téléphonique - les avantages annexes sont moins transparents au niveau local. Ainsi en va-t-il des frais de restauration engagés lors d’une réception au logement de fonction d’un président de région ou de département qui n’apparaîtront pas clairement".
Frais de représentation
Les frais de représentation, non imposables, sont réservés aux maires, ainsi qu’aux présidents de communauté urbaine et d’agglomération. Quantifiés par un vote du conseil municipal, ces frais visent des dépenses engagées pour des réceptions ou des manifestations dans l’intérêt de la commune. L’élu doit pouvoir justifier ces dépenses. Sinon, elles seront assimilées à une indemnité supplémentaire, un traitement déguisé illégal.
Des frais d’aide à la personne très spécifiques sont prévus pour les conseillers municipaux qui ne perçoivent pas d’indemnités de fonction. Sur délibération du conseil municipal, les frais de garde d’enfant ou d’assistance aux personnes âgées et handicapées peuvent être attribués aux élus ayant engagé de telles dépenses pour assister à des réunions communales ou intercommunales.
Pour l’ensemble de ces remboursements, "mieux vaut annoncer en début de mandat les règles du jeu", recommande Jacques Ferstenbert, pour éviter ensuite toute mauvaise surprise. Les dérives restent rares, les contentieux étant souvent résolus avant d’atteindre le pénal. Peut-être en partie parce que "les chambres régionales des comptes se mêlent peu des avantages en nature , sauf dans des cas d’abus manifestes", glisse René Dosière.
Handicap
Depuis le 19 mars 2005, les conseillers municipaux, généraux et régionaux en situation de handicap peuvent se faire rembourser des frais spécifiques de déplacement, d’accompagnement et d’aide technique (art. L.2123-18-1, L.3123-19 et L4135-19 du CGCT et décret du 14 mars 2005 relatif au remboursement des frais engagés par les élus locaux).
TELEPHONE ET INTERNET
Les frais de télécommunication supportés par les conseillers municipaux utilisant leur propre téléphone mobile et leur abonnement Internet personnel n’entrent pas dans la catégorie des frais remboursables, a prévenu le ministère de l’Intérieur en réponse à une récente question écrite d’un député (rép. min à la QE n° 65018 de Jean-Pierre Dufau, JOAN du 9/03/2010, p. 2771).