Au congrès des maires le 27 novembre, de nombreux élus ont rappelé que les budgets de fonctionnement aussi seraient largement touchés par la baisse des dotations. Une diminution qui entraînera, bien au-delà des seules dépenses liées aux effectifs et rémunérations des agents, des coupes dans diverses dépenses jugées essentielles, comme les subventions aux associations et le financement des services publics locaux.
Moins 10%, 15%, 20%, jusqu’à 30 %... depuis l’annonce par le gouvernement de la baisse des dotations programmée jusqu'en 2017, les maires et leurs associations n’ont de cesse d’alerter l’exécutif sur une chute des investissements locaux dont seule l’ampleur serait encore inconnue.
Si les élus ont largement relayé cette crainte au Congrès des maires lors du débat sur les finances locales du 27 novembre, les édiles ont aussi entonné une petite musique qui monte : l’impact sur les dépenses de fonctionnement, bien au-delà du seul poste budgétaire de rémunération des agents territoriaux.
« Très vite, s’il n’y a pas de mesures correctrices, notre épargne brute va être négative et nos collectivités vont se retrouver sous la tutelle du préfet, a lancé Antoine Homé, maire de Wittenheim (68). Il y a cette idée que l’investissement, c’est noble et pas le fonctionnement. Oui, l’investissement est noble, mais le fonctionnement aussi ! Le fonctionnement, ce sont les services à la population, les subventions aux associations », rappelle le rapporteur de la commission finances et fiscalité de l’AMF. « Des communes vont être en crise d’investissement, mais aussi de fonctionnement », a prévenu le sénateur-maire de Vaux-sous-Aubigny, Charles Guéné.
« L’asphyxie de nos communes »
Car la prévision est partagée par tous, des futurs patrons de métropoles aux maires de plus petites communes.
« Le fonctionnement hors masse salariale, c’est moins 10% sur la mandature demandée à mon administration. Ce sont aussi des subventions en moins que nous donnons à des associations, publiques ou privées : -5% à des associations dans le domaine de la culture et du social, qui nous disent qu’elles vont mettre la clé sous la porte », a témoigné le maire de Bordeaux, Alain Juppé.
Et le président de la communauté urbaine bordelaise, future métropole, de souligner que ces baisses s’ajoutent à celles des subsides en provenance des départements et des régions, eux aussi soumis à rude épreuve financière. « Le fonctionnement, c’est les services, le financement des associations », a appuyé Gérard Collomb, maire de Lyon et bientôt « patron » de Lyon métropole.
Même prévision noire dans des communes moyennes : 294 000 euros de moins en 2014, 637 000 en 2015, a calculé, pour sa ville de Vierzon (Cher), son député-maire Nicolas Sansu. « C’est impossible aujourd’hui de supporter cette baisse, et inefficace », a-t-il asséné.
Idem dans les communes plus modestes encore : « En 2016, ce sera en épargne négative : c’est intenable et intolérable », a tancé Patrick Genre, maire de Pontarlier. « Il faut bloquer l’asphyxie de nos communes », s'est exclamé un élu de Rozérieulles (Moselle) à l’adresse du gouvernement représenté lors du débat par le secrétaire d’Etat au budget, Christian Eckert.
Minoration ou étalement envisagés
Sans contredire les élus sur l’effort demandé aux collectivités, l’ancien rapporteur du budget à l’Assemblée a voulu minorer l’ampleur de celui-ci : « La baisse des dotations ne porte que sur un gros quart des recettes des collectivités locales. Sur les autres trois quarts, une partie des communes peut trouver une compensation dans l’évolution des leurs recettes », assuré Christian Eckert.
L’argument aura sans doute peu convaincu les élus, qui réclament pour la plupart a minima un étalement dans le temps de l’effort demandé aux collectivités. Voire l’adoption à l’Assemblée nationale de la minoration de la baisse des dotations votée au Sénat, une mesure appuyée par Alain Juppé. Mais dont lui-même reconnaît qu’elle a très peu de chances d’être retenue.
Logements : la très attendue révision des valeurs locatives retardée ?
L’arrêté permettant le lancement de l’expérimentation, en 2015, de la révision des valeurs locatives des logements, dans l’optique d’une généralisation en 2018, n’est toujours pas paru. Résultat : plusieurs associations d’élus estiment plausible un report de l’expérimentation (prévue dans cinq départements) en 2016 et celui de la généralisation en 2019.
Selon plusieurs sources, l’attentisme du gouvernement serait lié aux transferts fiscaux que la révision entraînerait entre contribuables d’une même commune. Un dossier sensible dont la gestion incomberait à la majorité issue des élections de 2017.
Le secrétaire d’Etat au Budget a pourtant semblé, lors du débat sur les finances locales au Congrès des maires, confirmer le calendrier voté par le Parlement : « A quand la réforme des valeurs locatives ? Le Sénat a adopté l’année dernière un amendement pour lancer cette expérimentation très lourde, avec d’abord l’expérimentation sur 5 départements ». « Nous sommes en train de réviser les valeurs locatives et la détermination du Gouvernement est sans faille, y compris sur les locaux d’habitation », a promis, peu après, le secrétaire d’Etat à la réforme territoriale, André Vallini.