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A rebours des grandes villes tentant de réguler les plateformes de location de logements entre particuliers, territoires ruraux et petites villes s’enthousiasment de cette manne touristique. Pour peu qu’ils ne laissent pas filer la taxe de séjour.
Augmentation des loyers, gentrification… Le succès des plateformes de locations de logements entre particuliers type Airbnb génère des désagréments croissants dans les métropoles. Au point que certaines tentent de réguler le système. Au contraire, les territoires ruraux y voient pour leur part un levier inespéré d’attractivité. « Avant les plateformes, la politique touristique mise en place en France depuis plusieurs années privilégiait des destinations mondiales. Si on n’était pas dans ces grandes marques internationales, on n’avait aucune chance d’être promu, aucune visibilité », rappelle Dominique Guilleux, directeur de l’agence de développement et de réservation touristiques d’Eure-et-Loir.
Pour tirer son épingle du jeu, l’Eure-et-Loir a été le premier à signer un partenariat avec Airbnb en avril 2018 avant de le renouveler en 2019. Et le bilan est encourageant : l’année passée, les voyageurs Airbnb, dont 22 % sont étrangers, ont généré 37 600 nuitées contre 23 642 en 2017 selon la plateforme américaine, soit une progression de 59 %. « Les gîtes ne suffisent plus pour répondre à la nouvelle offre touristique », confirme Christophe Bouillon, président de l’Association des petites villes de France (APVF).
Retombées fiscales
L’Association des maires ruraux de France (AMRF) vient de franchir le pas. « On a connu la fermeture d’hôtels de 10 à 30 chambres. On se retrouve avec des pépites touristiques sans hébergement. Mettre des biens privés sur le marché participe à la redynamisation des territoires et à sauver l’économie locale », explique Cédric Szabo, son directeur.
Problème annexe : comment récolter la taxe de séjour auprès des particuliers ? Pour le président de l’APVF, il n’y a plus de sujet grâce à l’évolution de la réglementation (voir encadré). « La vraie question est celle de la juste répartition avec la prise en compte des petits territoires. On espère entre 150 et 200 millions d’euros de recettes pour les collectivités. » Mais sans disposer des moyens de contrôle des métropoles, villages et petites villes se retrouvent parfois confrontées à une sous-déclaration de la taxe. Une perte fiscale préjudiciable pour les finances communales et une concurrence déloyale pour les hôteliers locaux. L’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih) a entamé un tour de France des élus locaux pour les pousser à réglementer la plateforme californienne. « On demande de la transparence et de l’équité. Les obligations réglementaires pour exploiter un hôtel sont exponentielles », s’énerve Laurent Duc, l’un des responsables de l’Umih.
Un appel entendu par le gouvernement qui a renforcé les sanctions dans la loi « Elan » : les particuliers n’ayant pas déclaré leurs locations touristiques auprès de la mairie sont passibles d’une amende de 5 000 € maximum par annonce. Ceux qui omettent de transmettre le décompte des nuitées, alors que la mairie leur en aura fait la demande, s’exposent à une amende pouvant atteindre 10 000 € par annonce. De plus, pour les villes moyennes ayant mis en place un numéro d’enregistrement, la limite de location d’une résidence principale est de 120 jours par an. Des mesures insuffisamment appliquées, estiment des hôteliers nouvellement concurrencés.
Qui collecte la taxe de séjour ?
En décembre 2017, les parlementaires ont fait évoluer, au sein de la loi de finances 2018, le calcul de la taxe de séjour pour la seule catégorie des logements non classés « meublés de tourisme ». Pour ces meublés, les villes fixent un taux compris entre 1% et 5% du prix de la nuitée par personne. Pour les logements classés (meublés, résidences de tourisme, hôtels, etc.), le montant est un tarif forfaitaire en euros par nuit et par personne. Depuis début janvier 2019, la taxe de séjour est collectée par les opérateurs numériques au tarif applicable à chaque hébergement. Ils deviennent intermédiaires de paiement. Dès lors qu’il a connaissance du taux appliqué, Airbnb prélève automatiquement l’ensemble du montant de la taxe sur le voyageur lors du paiement.
Airbnb dénonce le lobbying des hôteliers
Et si les propos de l’UMIH appelant les maires à la vigilance et à plus de régulation n’était rien d’autre qu’une « fake news » destinée à dénigrer et affaiblir Airbnb pour mieux protéger les activités des hôteliers ? C’est ce que semble penser l’entreprise californienne. D’après le service presse d’Airbnb, les maires qui considèrent le dispositif d’enregistrement comme un outil de contrôle de la taxe de séjour feraient erreur.
Depuis la mise en place de l’obligation légale de collecte de la taxe de séjour, la plateforme affirme la reverser automatiquement à toutes les communes françaises. Et refuse, dès lors, toute nouvelle mesure de contrôle. « La loi indique clairement qu’il incombe désormais à AirBnB et aux autres plateformes de location de courte durée, et non pas aux loueurs, de collecter la taxe de séjour prélevée aux voyageurs. Nous avons travaillé de concert avec les autorités fiscales françaises. Pour la seule année 2018, le système de collecte automatique mis en place par Airbnb a généré plus de 24 millions d’euros de revenus pour les collectivités françaises », précise Airbnb.
Une nouvelle attractivité pour les territoires ruraux
Le Favril (358 habitants) - Eure-et-Loir
Vice-président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), John Billard a négocié un partenariat avec Airbnb signé en février 2019. « C’est une belle opportunité qui permet de faire la promotion de territoires ruraux français pas forcément touristiques et aux habitants de mettre du beurre dans les épinards », défend le maire du Favril, village d’Eure-et-Loir. Mais le marché entre l’élu et la plateforme californienne n’est ni économique, ni financier. C’est un accord de principe qui n’est pas contraignant. Airbnb s’engage à mieux mettre en avant les territoires ruraux sur sa plateforme et à transmettre des chiffres réguliers sur son activité. L’une des premières retombées, selon l’élu, a été d’élargir la clientèle dans des lieux peu touristiques. « Certains petits villages de France ont découvert une diversité de touristes internationaux », se réjouit-il. Autre avantage, Airbnb fait aussi de la promotion touristique en indiquant les lieux à visiter autour de la location meublée. « Ce tourisme va faire vivre l’économie locale : les petits commerces, les musées… » s’enthousiasme le maire.
Tour de France des mairies
« Le seul point qui bloquait l’accord était la partie fiscalité, mais les choses se sont débloquées grâce aux difficultés des métropoles », explique John Billard. Et ce, sans avoir les problèmes que rencontrent les métropoles : « Nous ne sommes pas confrontés à une sursaturation ou à une grosse concurrence de l’hôtellerie. » Prochaine mission que se fixe John Billard : un tour de France pour convaincre certains élus encore réfractaires.
Contact : Mairie : 02 37 37 43 01
Des tentatives de régulation insuffisantes pour les hôteliers
Albi (49 024 habitants) - Tarn
Depuis son inscription à l’Unesco en janvier 2010, Albi accueille de plus en plus de touristes : 1,2 million par an. Dans l’hyper centre-ville, 351 locations de meublés privés sont disponibles sur Airbnb. « Nous avons un problème, explique le premier adjoint au maire Michel Franques. Seulement 96 locations sont déclarées en mairie. » Pour la ville, c’est un manque à gagner en terme de taxe de séjour de plus de 6 000 nuitées par an.
Des amendes pour les contrevenants ?
Pour y faire face, le conseil municipal a écrit au préfet afin qu’il autorise la procédure de changement d’usage des locaux d’habitation par arrêté préfectoral. L’arrêté a été pris par le préfet le 11 avril. « Tout loueur doit désormais se rapprocher de la commune pour avoir un numéro d’enregistrement. Quand un loueur voudra figurer sur une plateforme de location en ligne, la plateforme lui demandera ce numéro de 13 chiffres », précise l’élu. Les objectifs sont clairs : conserver un parc de logement pour les habitants dans l’hyper-centre, doper les recettes de taxe de séjour, lutter contre une concurrence déloyale pour les hôtels, gîtes et chambres d’hôtes, lutter contre la hausse des loyers… Mais cette stratégie ne va pas assez loin pour l’Union des métiers et industries de l’hôtellerie (Umih). Le président de sa branche « hôtellerie française », Laurent Duc, est pessimiste : « Il n’est pas sûr qu’Albi mette des amendes aux propriétaires qui n’ont pas déclaré leurs biens et encore moins qu’AirBnb soit condamné à 12 500 € par annonce publiée sans numéro d’enregistrement… »
Contact : Mairie : 05 63 49 10 10
Mardefon - 19/08/2019 10h:53
Je suis sidérée . Et Gites de France ? Il’y a une antenne dans chaque département et à Paris la fédération nationale qui chapotte tout le monde . Par ailleurs c’est un Label , qui contrôle tous ses adhérents , leur transmet les informations , les tenants de la loi de 2005 limitant le nombre de chambres (5) et de personnes(15) etc , etc . Et , puisque la Taxe de séjour a l’air d'être le sujet principal ...ils prélèvent cette T.S. ! Voilà un organisme qui existe depuis au moins 60 ans et pas un mot ! C.est ce Label qu’il faut aider organisCalifornien
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