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Réunies dans la Ville Rose les 28 et 29 mars, les présidents des grandes agglos et métropoles se disent oubliées de l’Etat, emportées par la vague pro-ruralités et territoires périurbains des gilets jaunes. Mais les exécutifs réunis sous la bannière de "France Urbaine" se montrent combatifs, tout autant contre l'actuelle remise en cause du fait intercommunal que l’idée laissant entendre que seuls les départements seraient comptables de la solidarité à l’égard des territoires plus modestes.
C'est dans une ville durement touchée par les débordements des manifestations des gilets jaunes qu'avaient décidé de se réunir les patrons de métropoles et grandes villes regroupées sous la bannière de France urbaine. Et au-delà des craintes de son maire, Jean-Luc Moudenc, pour sa ville à la veille de l’acte 20 des manifestations, le patron de France urbaine voit un autre risque dans cette contestation sans fin : celle d’une attention trop portée désormais par les pouvoirs publics aux territoires ruraux et périurbains.
« Méfions-nous de cette lecture simpliste et trop rapide qui consacre la vision d’une coupure radicale entre des métropoles dynamiques et des territoires périphériques qui seraient appauvris. Ces deux cartes ne se recouvrent pas aussi nettement », prévient-il.
Les (nombreux) dysfonctionnements du monde urbain
Le premier édile Toulousain veut batte en brèche ce « veux mythe qui veut que, puisque les villes sont grandes, elles sont riches ». Et Jean-Luc Moudenc d’égrener « les nombreuses difficultés dans nos grandes villes : congestion, pollution, pauvreté de pans entier de la population de nos villes : 20 % des ménages urbains ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté ». « La plupart des quartiers politique de la ville sont dans nos métropoles », a appuyé la présidente de Nantes métropole, Johanna Rolland.
A ces difficultés, Jean-Luc Moudenc ajoute deux volets qui préoccupent particulièrement les élus urbains aujourd'hui. Le premier, qui touche particulièrement les métropoles : « l’insécurité, le trafic de stupéfiants, les ravages du fondamentalisme ». Et un second, qu’on associe plus souvent aux campagnes : « la désertification médicale : elle nous touche maintenant dans nos grandes villes, atteignant même un seul sérieux dans nos quartiers politique de la ville ».
Fractures territoriales et guerre de l'opinion
« Nous sommes en train de perdre la bataille de l’opinion ! alerte le patron de Dijon métropole, François Rebsamen. L’ancien ministre sénateur regrette particulièrement la mise en accusation des grandes agglos dans la difficulté de redressement de nombreux territoires ruraux ou périurbains, et la vitalité du discours selon lequel « Les villes vont bien et on a appauvri les ruralités » : on est souvent tenus comme responsables pour l’opinion ! ».
Un discours qu’a tenu à nuancer le président du Sénat, en clôture des débats ce vendredi 29 mars, rappelant que « si le Sénat est souvent présenté comme assemblée du seigle et de la châtaigne, je suis aussi président d’une assemblée elus à plus de 70 % à la proportionnelle et de tous les territoires », sous-entendu résolument moderne et représentant aussi les métropoles… Or, Gérard Larcher a mis davantage d’entrain à défendre la voix au chapitre des territoires non métropolitains : « La France d’à côté n’est pas que rurale : elles est aussi celle des villes moyennes, dont certaines hors de l’aire de dynamisme métropolitain ». Et le patron des sénateurs n’hésite pas à faire sien ce sentiment d’un élu local qu'on lui a rapporté : « Paris est plus loin de Montluçon que de Londres ou Amsterdam ».
Le gouvernement virera-t-il ruraliste ?
Reste que les patrons des grandes villes de proviince craignent de voir la vague anti-métropoles se poursuivre, jusqu’à emporter avec elle les prochaines décisions de l’exécutif dans le cadre du grand débat. « Le monde urbain a été ignoré : pouvez-vous me situer une seule nouvelle mesure qui ait donné davantage de moyens au cours des 22 derniers mois à nos intercommunalités ? », interroge Jean-Luc Moudenc, alors que contrairement à l’année dernière à Dijon, aucun ministre n’était présent au congrès. Et là aussi, le maire de Toulouse s’ingénue à faire la liste des dossiers à l’arrêt : « la réforme de la fiscalité locale au point mort depuis des mois », la clause de revoyure dans la contractualisation financière avec l’Etat qui en reste à ce jour à « un clause de style », « une formule de politesse ».
Pire encore pour l’association des grandes agglomérations : France Urbaine craint un détricotage à venir de l’intercommunalité. « Voici que ressurgit un discours que l’on croyait soldé, qui fait le procès de de l’intercommunalité, qui célèbre le retour de la commune magnifiée dans un splendide isolement », alerte le patron des grandes villes, ciblant clairement et sans la nommer l’Association des maires de France (AMF). « Si France urbaine est attaché à la commune, nous ne cautionnerons jamais ce mouvement de régression de l’intercommunalité, c’est-à-dire le retour en arrière », prévient-il. Si le président de la métropole occitane (763 000 habitants) se dit conscient des difficultés de certaines intercos « XXL », il assène : « la révision doit être circonscrite à la ruralité ».
La fusion départements-métropoles pas enterrée à 100% ?
Enfin, interrogé sur les projets de fusion départements-métropoles qui ont du plomb dans l’aile – Nantes, Bordeaux et Lille ont déclaré forfait, seule Aix-Marseille pourrait fusionner avec les Bouches-du Rhône –, le président de Toulouse Métropole reste combatif : « dans un certain nombre de département, le conseil départemental assure un rôle de cohésion. Mais dans un certain nombre d’autres, son utilité n’est plus ressentie par le citoyen. Des décennies d’action sociale départementales ont-elles partout assuré la cohésion territoriale ? » interroge-t-il. Et Jean-Luc Moudenc, en pleine guerre des compétences Dijon-Côte-d’Or, d’apporter « son soutien à la métropole de Dijon, en but aux conservatismes pour l’empêcher d’assumer les huit domaines de compétences départementales prévues par la loi »…
Les élus de France urbaine auront ainsi l’occasion de porter cette « combativité » revendiquée le 9 avril, une délégation de l’association d’élus devant être reçue par Emmanuel Macron.