Jean-Philippe Magnen
© Flickr CC by Manuel
Il existe une trentaine de monnaies locales complémentaires en France. Ces moyens d'échange connaissent un essor, favorisé par la crise et les insuffisances de l'euro. Un rapport, remis à la ministre Carole Delga, le 9 avril 2015, par le vice-président du Réseau des territoires pour une économie solidaire (RTES) Philippe Magnen (photo), contient 12 propositions pour les conforter.
Les monnaies locales complémentaires (MLC) ne sont pas une aimable fantaisie pour utopistes. Elles sont désormais considérées comme un moyen de dynamiser des territoires en favorisant la relocalisation des activités et de faciliter le développement de nouvelles activités dans le domaine de l’économie sociale et solidaire. Au point que la loi relative à l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014 reconnaît juridiquement ces monnaies ((L’article 16 de la loi ESS reconnaît les monnaies locales complémentaires comme titres de paiement dès lors que ceux-ci sont l’initiative de structures relevant des acteurs de l’ESS définis à l’article 1er de cette même loi)).
[caption id="attachment_38132" align="alignleft" width="380"] Carole Delga, secrétaire d’Etat à l’économie sociale et solidaire[/caption]
Un rapport intitulé « D’autres monnaies pour une nouvelle prospérité », remis le 9 avril à Carole Delga, secrétaire d’Etat chargée de l’Economie sociale et solidaire, formule 12 propositions pour accompagner leur essor. Ce rapport est la conclusion d’une mission d’étude sur les monnaies complémentaires confiée à Jean-Philippe Magnen, vice-président de la région des Pays de la Loire et vice-président du Réseau des territoires pour une économie solidaire (RTES).
Quatre types de monnaies
Une trentaine de ces monnaies, comme l'Abeille de Villeneuve-sur-Lot, le Sol-Violette de Toulouse ou la Muse d'Angers existent déjà en France. De quoi s’agit-il ? de « dispositifs d’échange locaux de biens, de services et de savoirs, organisés autour d’une monnaie spécifique permettant à la fois d’évaluer et de régler des échanges ». Ces monnaies, pour lesquelles il n’existe pas une formule unique, ne sont pas destinées à remplacer l’euro, mais à pallier certaines de ses insuffisances. Il peut s’agir d’un système de crédit mutuel à l’occasion d’un don et d’un contre-don. D’autres expériences portent sur une monnaie avec un usage territorial réduit.
La mission a identifié 4 types de monnaies :
- Des MLC classiques circulant entre citoyens et commerçants ou producteurs, pour des échanges de produits ou services répondant à un certain nombre de critères.
- Des monnaies tournées vers les échanges interentreprises, facilitant le crédit sans passer par le système bancaire.
- Les monnaies thématiques, visant à développer la consommation de produits ou services d’une filière.
- Les monnaies utilisées pour des services ciblées, tels les titres Cesu, vacances, restaurants…
Impact encore modeste
L’impact de ces monnaies reste très modeste : la masse monétaire moyenne en circulation, en avril 2014, selon l’enquête de la mission, correspond environ à l’équivalent de 26 000 euros. Le nombre moyen d’utilisateurs est de 450, et celui des prestataires impliqués de 90 environ.
Certains projets évoluent cependant fortement, à l’exemple de l’Eusko lancé au pays basque il y a deux ans.
Les 12 propositions de la mission de Jean-Philippe Magnen
- Accompagner et évaluer l’application de l’article 16 de la loi relative à l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014
- Elaborer un guide facilitant les démarches des porteurs de projet
- Promouvoir un débat public sur ce thème
- Réfléchir à la mise en place d’un observatoire pérenne sur les monnaies locales
- Concevoir et tester une méthode d’évaluation
- Lancer une étude de faisabilité pour la conception de plates-formes régionales autofinancées de monnaies complémentaires
- Engager une recherche-action sur les systèmes base-temps et l’implication des volontaires du service civique
- Appuyer une démarche d’audit des richesses sur les territoires
- Expérimenter la mise en place de Barters ((chambres de compensation et systèmes d’échanges interentreprises))spécifiques pour dynamiser les pôles territoriaux de coopération économique
- Réfléchir à la mise au point d’une monnaie affectée à la formation professionnelle des demandeurs d’emploi
- Expérimenter une monnaie facilitant l’accès au crédit et l’initiative économique auprès du réseau de micro-entrepreneurs de l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE)
- Faire expertiser la proposition faite dans le cadre de la Mission d’une organisation monétaire territorialisée et basée sur la valeur sociale du carbone évité, en vue de la Conférence dite « COP21 »