Un pas vers une meilleure concertation sur les projets impactant l’environnement

Prévue pour entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 2017, l’ordonnance visant à réformer le dialogue environnemental, après une longue période préparatoire, a été promulguée au début du mois d’août. Le texte crée notamment un « droit d’initiative citoyenne », qui pourra aussi être utilisé par les collectivités locales dont le territoire serait impacté par le projet.
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Les collectivités territoriales et la démocratie participative
voir le sommaireL’ordonnance « portant réforme des procédures destinées à assurer l’information et la participation du public à l’élaboration de certaines décisions susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement » a été présentée en Conseil des ministres et promulguée le 3 août dernier, soit près d’un an après le vote de la loi « Macron » dont elle découle.
Sa rédaction s’inspire du rapport de la commission spécialisée du Conseil national de la transition écologique que le sénateur Alain Richard a remis en juin 2015 sous le titre « Démocratie environnementale : débattre et décider »(1).
On se rappelle que ces travaux avaient été souhaités par le président de la République, dans le contexte de la forte contestation du projet de barrage de Sivens, dans le Tarn. Sur place, l’un des opposants, Rémi Fraisse, avait alors trouvé la mort sur le terrain de la « ZAD » après le lancement par les gendarmes d’une grenade offensive.
Un champ de concertation élargi
Cette ordonnance vient modifier le Code de l’environnement. Outre qu’elle élargit le champ de la concertation aux « plans et programmes » – en plus des projets d’aménagement ou d’équipement ayant des conséquences sur l’environnement –, le texte ajoute un chapitre préliminaire et un chapitre Ier(2) pour préciser les objectifs de la participation du public aux décisions ayant un impact sur l’environnement ainsi que les droits que cette participation confère au public.
Objectifs :
- « améliorer la qualité de la décision publique et contribuer à sa légitimité démocratique,
- assurer la préservation d’un environnement sain pour les générations actuelles et futures,
- sensibiliser et éduquer le public à la protection de l’environnement ».
Droits :
- « accéder aux informations pertinentes permettant sa participation effective,
- demander la mise en œuvre d’une procédure de participation dans les conditions prévues au chapitre Ier,
- disposer de délais raisonnables pour formuler des observations et propositions,
- être informé de la manière dont il a été tenu compte de ses observations et propositions dans la décision d’autorisation ou d’approbation ».
Plus de droits pour le public…
Le texte crée notamment un « droit d’initiative citoyenne » qui permet au public de solliciter le représentant de l’Etat pour qu’il organise une concertation préalable aux projets qui, sous maîtrise d’ouvrage publique, dépassent un certain montant de dépenses prévisionnelles – fixé par décret en Conseil d’Etat – ou bien qui bénéficient d’un montant d’aides publiques supérieur à ce certain montant.
Qui peut déclencher ce droit d’initiative ? Un nombre de ressortissants majeurs de l’UE, résidant dans le périmètre de la déclaration d’intention, égal à 20% de la population recensée dans les communes du périmètre ou bien égal à 10% de la population recensée dans le ou les départements, la ou les régions où se trouve tout ou partie du territoire concerné par la déclaration d’intention.
De même, une collectivité territoriale dont le territoire est concerné en tout ou partie peut faire valoir ce droit, tout comme une association agréée au niveau national, deux associations ou encore une fédération d’associations agréées dans une région ou un département concerné(e) par le projet.
En outre, le texte de loi renforce la procédure facultative de concertation préalable pour les projets, plans ou programmes hors champ du débat public.
…et de pouvoir pour la Commission nationale du débat public
© CNDP-debatpublic.fr
Enfin, dans un dernier volet, l’ordonnance intervient sur les modalités des procédures de concertation, en aval. Le ministère, dans un communiqué, évoque une « modernisation » à travers la dématérialisation de l’enquête publique, désormais consultable en ligne.
Pour autant, tous les modes actuels de consultation, tout comme la possibilité de solliciter le commissaire-enquêteur, dont le rôle important est réaffirmé, sont maintenus. De même, dans le cadre des plans, programmes et projets non soumis à enquête publique, il sera désormais possible de participer par voie électronique.
Entrée en vigueur dès 2017
Le texte prévoit d’autres mesures pour renforcer les débats, comme la possibilité de prolonger l’enquête publique « en cas de modification substantielle de l’étude d’impact et non pas seulement du projet » ou encore celle d’organiser une réunion publique après la clôture de l’enquête publique en vue d’un dernier échange entre le public et les porteurs du projet.
L’ordonnance entrera en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2017.
Sommaire du dossier
34 articles Lire le 1er article- Article 01 - Nouvelle mandature : un débat public local à vivifier
- Article 02 - « Ne craignez pas d’aborder les enjeux de fond qui préoccupent nos concitoyens »
- Article 03 - L’Indre-et-Loire promeut la participation cantonale
- Article 04 - La participation citoyenne en perpétuel chantier
- Article 05 - Démocratie participative : « l’outil a pris le pas sur l’objectif politique »
- Article 06 - « Chambre de la société civile » : faut-il institutionnaliser la participation citoyenne ?
- Article 07 - Comment 400 Mulhousiens ont pesé dans l’attribution d’un marché public
- Article 08 - Les budgets participatifs, étape par étape
- Article 09 - Les conseils de quartier
- Article 10 - La démocratie participative cherche sa place au milieu des institutions
- Article 11 - Les comités consultatifs locaux
- Article 12 - Votations locales : organiser la campagne et le scrutin
- Article 13 - Mettre en place référendums et consultations
- Article 14 - « Coopérative » et « continue » : les préconisations du Sénat pour dépasser la démocratie participative
- Article 15 - Démocratie participative : pas si simple ! alertent les élus locaux
- Article 16 - La démocratie semi-directe, pour des débats publics de qualité et un système politique efficace
- Article 17 - Budgets participatifs : à la recherche de la collaboration optimale
- Article 18 - Portrait-robot de ces communes qui ont lancé un budget participatif
- Article 19 - Un pas vers une meilleure concertation sur les projets impactant l’environnement
- Article 20 - Paris veut embarquer ses élus et les agents de la Ville dans sa mutation participative
- Article 21 - Conseils citoyens : des instances incontournables du contrat de ville
- Article 22 - Montreuil boucle son premier budget participatif, après Paris et Grenoble
- Article 23 - Dialogue environnemental : pour une plus grande participation des citoyens, plus tôt
- Article 24 - Dialogue environnemental : « Nos propositions devront être opérationnelles, sans être sources de vices de forme »
- Article 25 - « La pédagogie sur les politiques publiques est un enjeu démocratique central »
- Article 26 - Environnement : vers un renforcement de la démocratie participative
- Article 27 - Démocratie participative : des propositions pour « renforcer le lien entre élu-e-s et citoyen-ne-s »
- Article 28 - Yves Sintomer, professeur de sciences politiques : « Le tirage au sort permettrait de recrédibiliser la politique »
- Article 29 - « Faire appel à la société civile locale pour solidifier notre démocratie »
- Article 30 - Diagnostics urbains « en marchant » : quand les usagers font l’expertise
- Article 31 - Alice Mazeaud : « Fixer les règles du jeu et s’y tenir » pour réussir son budget participatif
- Article 32 - Le cadre juridique de la démocratie participative, du légal à l’extralégal
- Article 33 - 50 questions sur la démocratie locale – Droit pratique
- Article 34 - Les finalités de la démocratie participative : quelle complémentarité entre démocratie représentative et démocratie participative ?
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