Dialogue environnemental : « Nos propositions devront être opérationnelles, sans être sources de vices de forme »

Alain Richard a été nommé président de la Commission spéciale de démocratisation du dialogue environnemental le 19 février dernier. Son équipe devra faire des propositions concrètes et applicables immédiatement d'ici fin mai 2015. Les propositions « devront trouver, si nécessaire, leur concrétisation dans un texte législatif avant la fin de l'année », insiste la lettre de mission.
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Les collectivités territoriales et la démocratie participative
voir le sommaireLa mission fixée par le gouvernement
La Commission spécialisée pour la démocratisation du dialogue environnemental, dont la création avait été annoncée début janvier (voir notre article), a été installée le 19 février 2015, par la ministre de l’Environnement, Ségolène Royal. Le sénateur du Val-d’Oise Alain Richard en a été désigné le président. Il est aussi président de la Commission spéciale de modernisation du droit environnemental qui, au travers d’un groupe de travail dirigé par le professeur Gérard Monédiaire, a déjà présenté devant le Conseil national pour la transition énergétique (CNTE) ses travaux visant à « une plus grande effectivité du dialogue environnemental par une amélioration de la concertation et des dispositifs d’enquête publique ».
Pour mener à bien ce travail, le sénateur sera entouré de plusieurs personnalités issues du milieu universitaire et de praticiens du secteur, ainsi que des membres désignés du Conseil national de la transition énergétique, instance que la ministre a souhaité voir impliquée. Ensemble, ils devront travailler « à renforcer les procédures existantes, d’assurer la transparence du débat public, sans allonger les délais », tel qu’on peut le lire dans la lettre de mission daté du 4 février.
Concrètement, la Commission a moins de trois mois pour faire des propositions. Conformément au souhait du Président de la République, la ministère a fixé l’échéance à « fin mai », souhaitant que le CNTE puisse ensuite en débattre rapidement et qu’une mise en œuvre rapide soit possible. Les propositions « devront trouver, si nécessaire, leur concrétisation dans un texte législatif avant la fin de l’année », insiste la lettre de mission.
Courrierdesmaires.fr. On vous a donné un délai de trois mois. N’est-ce pas trop court ?
Alain Richard. Non. D’une part, ce sujet n’est pas infini. D’autre part, on a à répondre à quelques questions qui ne sont certes pas toutes simples, mais sur lesquelles on ne découvre pas tout, quand même. Il nous faut avoir ce minimum de méthode qui consiste à ne pas gaspiller la réflexion qui a déjà été menée sur le sujet.
Par ailleurs, autour de la table, j’ai beaucoup de gens qui sont très productifs sur cette question-là. Donc, mon devoir va plutôt être de concentrer les nombreuses réflexions et de bien mettre d’accord tout le monde sur le produit fini qui va répondre à la demande émanant du président de la République.
J’ai insisté sur ce point dans la première réunion. Mon rôle est de permettre qu’à la fin, nous ne nous en tenions pas à des généralités sympathiques mais non opérationnelles. Nous verrons quelle part de nos propositions relèvera à proprement parler du législatif et quelle part sera de l’ordre de la recommandation de bonnes pratiques. En tous les cas, ce devra être applicable, sans être source de vices de forme.
Comment cette commission spéciale va-t-elle s’articuler avec la commission spéciale de modernisation du droit environnemental dont vous avez aussi la présidence ?
A. R. J’ai demandé comme une indulgence à l’équipe de Ségolène Royal de ne pas trop nous solliciter dans le cadre de la commission de modernisation pendant que nous sommes sur ces travaux. Une bonne partie des personnes impliquées siègent dans les deux commissions.
Sur le contenu, nous débuterons certainement notre travail à partir de la réflexion menée par le groupe de travail de la commission « modernisation » qui s’est penchée sur le dialogue et la concertation. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai demandé que Gérard Monédiaire soit à mes côtés en même temps que Laurence Monnoyer-Smith, qui a travaillé avec lui dans le groupe de travail en question.
Dans un second temps, nous pensons faire venir des experts dont on connaît les travaux et qui nous paraissent susceptibles d’apporter des propositions de mise en œuvre.”© Flickr-ConseildEtat
Comment entendez-vous organiser votre travail ?
A. R. Nous envisageons dans un premier temps de recevoir des témoignages de personnes qui ont été impliquées dans des processus de décisions, certains en étant dans l’opposition à un projet ou parmi les personnes proposant des alternatives, certaines en ayant été impliquées dans des processus qui ont abouti à faire évoluer les projets et à en réduire les oppositions. Nous travaillons dès ce début de semaine à sélectionner des gens représentatifs de ces expériences.
Nous avons dans l’idée que cela peut nous permettre d’avoir une idée de la « symptomatologie », de la pathologie de ces dispositifs de concertation. L’objectif n’est pas de demander aux gens de raconter leurs aventures mais, partant de leur expérience, d’exposer ce qui, à leur avis, a bien fonctionné et ce qui, au contraire, pourrait être amélioré pour rendre plus fiable le processus de participation.
Dans un second temps, nous pensons faire venir des experts dont on connaît les travaux et qui nous paraissent susceptibles d’apporter des propositions de mise en œuvre. Nous ferons la liste en fonction des réunions de travail que nous aurons eues.
Vous entendez donc solliciter des personnes actives sur les grands projets aujourd’hui contestés ?
A. R. J’ai demandé aux membres de la commission de réserver une journée entière pour ces auditions. Cela fait à la fois du temps et un nombre forcément limité d’expériences. Donc nous allons devoir faire une sélection.
J’essaye d’être diplomate. J’ai consulté des membres de la commission pour qu’ils me fassent une liste courte de personnes et d’expériences qui leur paraissent à la fois représentatives et utiles pédagogiquement. Ce ne sont pas forcément ceux qui sont à la une de l’actualité.
Par ailleurs, pour compléter ce travail d’audition, le Commissariat général au développement durable nous a suggéré d’ouvrir une plateforme de dialogue.
Références
Sommaire du dossier
34 articles Lire le 1er article- Article 01 - Nouvelle mandature : un débat public local à vivifier
- Article 02 - « Ne craignez pas d’aborder les enjeux de fond qui préoccupent nos concitoyens »
- Article 03 - L’Indre-et-Loire promeut la participation cantonale
- Article 04 - La participation citoyenne en perpétuel chantier
- Article 05 - Démocratie participative : « l’outil a pris le pas sur l’objectif politique »
- Article 06 - « Chambre de la société civile » : faut-il institutionnaliser la participation citoyenne ?
- Article 07 - Comment 400 Mulhousiens ont pesé dans l’attribution d’un marché public
- Article 08 - Les budgets participatifs, étape par étape
- Article 09 - Les conseils de quartier
- Article 10 - La démocratie participative cherche sa place au milieu des institutions
- Article 11 - Les comités consultatifs locaux
- Article 12 - Votations locales : organiser la campagne et le scrutin
- Article 13 - Mettre en place référendums et consultations
- Article 14 - « Coopérative » et « continue » : les préconisations du Sénat pour dépasser la démocratie participative
- Article 15 - Démocratie participative : pas si simple ! alertent les élus locaux
- Article 16 - La démocratie semi-directe, pour des débats publics de qualité et un système politique efficace
- Article 17 - Budgets participatifs : à la recherche de la collaboration optimale
- Article 18 - Portrait-robot de ces communes qui ont lancé un budget participatif
- Article 19 - Un pas vers une meilleure concertation sur les projets impactant l’environnement
- Article 20 - Paris veut embarquer ses élus et les agents de la Ville dans sa mutation participative
- Article 21 - Conseils citoyens : des instances incontournables du contrat de ville
- Article 22 - Montreuil boucle son premier budget participatif, après Paris et Grenoble
- Article 23 - Dialogue environnemental : pour une plus grande participation des citoyens, plus tôt
- Article 24 - Dialogue environnemental : « Nos propositions devront être opérationnelles, sans être sources de vices de forme »
- Article 25 - « La pédagogie sur les politiques publiques est un enjeu démocratique central »
- Article 26 - Environnement : vers un renforcement de la démocratie participative
- Article 27 - Démocratie participative : des propositions pour « renforcer le lien entre élu-e-s et citoyen-ne-s »
- Article 28 - Yves Sintomer, professeur de sciences politiques : « Le tirage au sort permettrait de recrédibiliser la politique »
- Article 29 - « Faire appel à la société civile locale pour solidifier notre démocratie »
- Article 30 - Diagnostics urbains « en marchant » : quand les usagers font l’expertise
- Article 31 - Alice Mazeaud : « Fixer les règles du jeu et s’y tenir » pour réussir son budget participatif
- Article 32 - Le cadre juridique de la démocratie participative, du légal à l’extralégal
- Article 33 - 50 questions sur la démocratie locale – Droit pratique
- Article 34 - Les finalités de la démocratie participative : quelle complémentarité entre démocratie représentative et démocratie participative ?
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