Les autorités locales et les marchés publics sont vulnérables à la corruption

A l'occasion de la sortie du premier rapport sur la corruption dans l'Union européenne, la Commission souligne que le risque est particulièrement élevé chez les autorités locales et régionales et dans le domaine des marchés publics. Elle formule des recommandations spécifiques pour la France.
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Règlements, pratiques, concurrence : gérer au mieux l’achat public et ses marchés
voir le sommaireLa corruption en Europe coûte 120 milliards d’euros à l’économie de l’Union et touche tous les pays, selon un rapport publié par la Commission, son premier « Rapport anticorruption de l’UE », publié le 3 février. La publication le même jour d’une enquête Eurobaromètre montre que 76 % des Européens pensent que la corruption est un phénomène très répandu et que 56 % d’entre eux que le niveau de corruption a augmenté dans leur pays au cours des trois dernières années.
Le rapport général souligne le fait que l’intégrité de la vie politique est un problème dans de nombreux Etats membres.
Pas de définition de l’agent public
La Commission souhaiterait une approche commune de la question de la corruption. Mais elle se heurte à l’absence de définition harmonisée, au niveau de l’UE, de l’ « agent public », qui engloberait les élus. Une proposition de directive a été présentée en 2012 relative à la protection assurée par le droit pénal contre la fraude et autres délits portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union, qui contient une définition de la notion d’« agent public » comprenant les personnes investies d’un mandat législatif. Ni le Conseil, ni le Parlement ne soutiennent la définition proposée, qui vise à criminaliser les actes de corruption commis par des élus.
Autorités locales et marchés publics
Alors que, partout, les risques de corruption aux niveaux régional et local sont plus élevés, l’un des secteurs les plus vulnérables est celui de la promotion et la construction immobilière en zone urbaine, quel que soit l’Etat membre considéré.
Les marchés publics, domaine sensible étant donné leur poids dans les économies nationales, sont particulièrement vulnérables à la corruption. Les problèmes généralement cités sont :
- la rédaction de cahiers des charges sur mesure en faveur de certains soumissionnaires,
- le saucissonnage en marchés d’un montant inférieur pour éviter la mise en concurrence,
- les conflits d’intérêts à divers stades de la procédure et concernant non seulement les agents publics chargés de la procédure mais également des niveaux plus élevés du pouvoir adjudicateur,
- les critères de sélection disproportionnés et injustifiés,
- l’exclusion injustifiée de soumissionnaires,
- le recours injustifié aux procédures d’urgence,
- l’analyse insuffisante des situations lorsque le prix de l’offre est trop bas,
- le poids excessif accordé au prix le plus bas comme critère principal au détriment de critères relatifs à la qualité des éléments livrables et à la capacité d’exécution,
- les exemptions injustifiées de la publication des offres.
La Commission s’inquiète particulièrement pour les marchés publics régionaux et locaux, lorsque les contrôles ne compensent pas les pouvoirs des autorités locales. Les secteurs les plus fragiles sont ceux de la construction liés au développement urbain et la gestion des déchets.
Recommandations de la Commission
Pour prévenir ces situations, la Commission recommande :
- d’évaluer systématiquement les risques de corruption dans les marchés publics ;
- d’appliquer des normes de transparence exigeantes à toutes les phases des marchés ;
- de renforcer les mécanismes de contrôle internes et externes ;
- de former et sensibiliser les acteurs ;
- de renforcer les régimes de sanctions.
Le cas de la France
Concernant la France, la Commission relève qu’elle a pris, encore récemment, des mesures législatives contre la corruption et en matière de conflits d’intérêts applicables au personnel politique et aux agents publics, mais ne dispose pas d’une stratégie nationale. Elle regrette l’absence de mesure concernant les marchés publics.
La Commission propose donc que « la France procède à une évaluation globale visant à détecter les risques au niveau local et fixe des priorités pour des mesures de lutte contre la corruption dans le secteur des marchés publics ».
Une enquête Eurobaromètre montre que 68 % des Français estiment que la corruption est très répandue dans leur propre pays (moyenne européenne : 76 %) et 2 % d’entre eux déclarent avoir été explicitement ou implicitement été invités à payer un pot-de-vin au cours de l’année écoulée. 58 % des Français (moyenne UE : 56 %) pensent que recevoir des pots-de-vin et commettre un abus de pouvoir pour son bénéfice est une pratique répandue parmi les responsables politiques.
Doutes sur les marchés publics
Selon le sondage Eurobaromètre de 2013 sur la corruption réalisé auprès des entreprises, 50 % des personnes interrogées estiment que la corruption est un phénomène répandu dans les marchés publics gérés par les autorités nationales, et 51 % le pensent concernant les marchés publics administrés par les autorités locales.
Le rapport rappelle que ces chiffres ne reflètent pas nécessairement un rapport direct avec la corruption mais soulignent des facteurs de risque.
Cumul des mandats
La Commission, qui retrace le cheminement législatif pour limiter le cumul des mandats, « l’un des facteurs les plus propices à la corruption », selon le service central de prévention de la corruption (SCPC), et les conflits d’intérêts, regrette que les déclarations de situation patrimoniale, prévue par la loi récente, ne comportent aucune donnée sur le patrimoine détenu par le ménage ou les membres de la famille de l’élu. Par ailleurs, le contrôle du financement des partis est encore insuffisant.
Recommandations
La Commission recommande à la France de repérer les risques spécifiques au niveau local et de poursuivre les réformes sur la déclaration patrimoniale et les conflits d’intérêts en ce qui concerne les agents publics. Elle conseille également d’aller vers une plus grande transparence des informations financières lors des campagnes électorales et de renforcer les fonctions de contrôle et les moyens de la Commission nationale de contrôle des comptes de campagne et des financements politiques.
Références
- Rapport de la commission au Conseil et Parlement européen. Rapport anticorruption de l’UE
- Annexe France au rapport anticorruption de l’UE
- Rapport Eurobaromètre sur la corruption
- Données Eurobaromètre concernant la corruption en France
Sommaire du dossier
25 articles Lire le 1er article- Article 01 - Peut-on faciliter le choix de marchés publics mutualisés par le maire ?
- Article 02 - Peut-on instaurer la préférence locale pour attribuer un marché public ?
- Article 03 - Marchés publics : vers un relèvement du seuil de déclenchement à 40 000 euros en 2020
- Article 04 - Marché public : une note technique minimale, possible préalable à l’examen du critère « prix »
- Article 05 - Marchés publics dématérialisés : le guide pratique de Bercy pour les acheteurs
- Article 06 - Les tourments de l’acheteur public local pour modifier un marché en cours (1/2)
- Article 07 - Note sur la réforme des marchés publics entrée en vigueur le 1er avril 2016
- Article 08 - Les délégations de signature des marchés publics locaux, entre formalisme et pragmatisme
- Article 09 - Délégations de services publics : quand le privé profite de l’édile…
- Article 10 - Commande publique : développer les achats socialement responsables
- Article 11 - Passation des marchés publics dématérialisés, suivez le guide
- Article 12 - Les nouveaux seuils européens des marchés publics
- Article 13 - 25 000 euros : nouveau seuil de dispense de procédure pour les marchés publics
- Article 14 - Marchés publics : le bon usage du seuil de 25 000 euros
- Article 15 - L’essentiel de l’actualité juridique des marchés publics
- Article 16 - Marchés publics : le conseil général de l’Aube accélère sa mue vers la dématérialisation
- Article 17 - Vade-mecum des marchés publics, l’édition 2015
- Article 18 - Marchés publics, un dossier prioritaire pour les collectivités territoriales
- Article 19 - Contrats publics et collectivités territoriales : l’essentiel de la jurisprudence 2013
- Article 20 - Louer ou acheter ses véhicules, quelle est la meilleure solution pour la collectivité territoriale ?
- Article 21 - Les autorités locales et les marchés publics sont vulnérables à la corruption
- Article 22 - Organiser la mutualisation intercommunale des achats
- Article 23 - La gestion des marchés publics – 50 questions
- Article 24 - La gestion des marchés publics
- Article 25 - Une collectivité peut confier à une autre un marché public de travaux sous strictes conditions
Article précédent (19/25) Louer ou acheter ses véhicules, quelle est la meilleure solution pour la collectivité territoriale ? Article suivant (21/25) Organiser la mutualisation intercommunale des achats
il faut mettre a jour les rapports juridique contre la corruption entre tout les pays de L UE+et surtout pour les travaux du BTP , qui ne punisse plus les fraudeurs ,trop compliquer a deffinire les infractions , car les lois d un pays a l autre en traduction n on plus la meme signification , surtout pour les personnes publiques ayant un poste sous l uminite