La transparence de la vie politique, « urgence » démocratique – Introduction

La crise économique et sociale a durablement accentué et consolidé le ressentiment à l’égard du « personnel » politique. Seul le maire recueille encore le plus haut niveau de confiance des Français, même cette confiance s’érode depuis quelque temps... Les élus « tous pourris » ? La résurgence de ce stéréotype risque d'être celles de toutes les formes de populismes. Car de la défiance au rejet, il n’y a qu’un pas, qui pourrait conduire beaucoup d’élus sortants à raccrocher l’écharpe tricolore en mars 2014. Et laisser le champ libre à toutes les formes de populisme. Le gouvernement agit sur plusieurs fronts pour essayer de restaurer la confiance, favoriser la transparence de la vie politique en est un.
Le constat est alarmant : coup sur coup, deux sondages d’opinion montrent sans ambages la défiance des Français à l’endroit des hommes et des femmes politiques. Pour une majorité d’entre eux, non seulement « le système démocratique fonctionne plutôt mal en France » (72 % des sondés), mais « les hommes et les femmes politiques agissent principalement pour leurs intérêts personnels » (82 %) et « la plupart d’entre eux sont corrompus » (62 %), selon l’enquête réalisée du 9 au 15 janvier 2013 (1) *. Ces résultats confirment ceux du Baromètre de la confiance politique du Cevipof, réalisé entre le 5 et le 20 décembre 2012. En trois ans, l’image des institutions s’est dégradée.
Affronter les « peurs » de nos concitoyens
La crise économique et sociale a durablement accentué et consolidé le ressentiment à l’égard du « personnel » politique. Seul le maire recueille encore le plus haut niveau de confiance des Français, même s’il s’érode (57 % des sondés en 2012 contre 65 % en 2009). Une maigre consolation en cette dernière année de mandat municipal. Et un signal fort pour l’avenir. En première ligne face à la crise, les maires devront plus que jamais répondre lors du prochain mandat municipal (2014-2020) aux « peurs » exprimées par leurs concitoyens dans les enquêtes d’opinion : crainte de la mondialisation, réticence croissante envers l’Europe, certitude du déclin de la France, crispation identitaire…
Menace pour la démocratie
Le prochain mandat devra aussi être celui de la reconquête de l’opinion. Les élus « tous pourris » ? La résurgence de ce stéréotype, entretenu régulièrement par la une de quelques journaux pointant démesurément la « folie » de certains élus locaux, n’est pas surprenante en temps de crise. Mais de la défiance au rejet, il n’y a qu’un pas, qui pourrait conduire beaucoup d’élus sortants à raccrocher l’écharpe tricolore en mars 2014. Et laisser le champ libre à toutes les formes de populisme.
Restaurer la confiance
Le gouvernement semble avoir pris la mesure des choses. Il agit sur plusieurs fronts pour restaurer la confiance entre les élus et les Français : interdire le cumul des mandats pour casser l’image négative qu’il génère, réformer les modes de scrutin locaux pour favoriser la parité, la transparence et le renouvellement de la classe politique. Enfin, renforcer le statut de l’élu pour faciliter et sécuriser l’exercice du mandat. Une manière de rappeler que les élus locaux prennent des risques personnels, professionnels et financiers pour accomplir un mandat. Un mandat qui, n’en déplaise aux pourfendeurs de la gestion locale, s’apparente davantage à une forme de bénévolat républicain qu’à une sinécure.
AGIR SUR LE FRONT DE LA TRANSPARENCE DE LA VIE PUBLIQUE
« Les élus doivent être disponibles, respectés et considérés », affirmait le chef de l’Etat devant le Congrès des maires, le 20 novembre 2012. « Rien n’est pire que la suspicion ou le doute », ajoutait François Hollande. Une référence implicite à la « crise de confiance » entre élus et citoyens, soulignée par le président de Transparency International France, alors même que l’affaire Cahuzac n’avait pas encore éclaté. Depuis, le dossier s’est logiquement complexifié… et accéléré. Si les propositions de la commission « Jospin » sur la rénovation et la déontologie de la vie publique, en novembre 2012, faisaient consensus pour renforcer le « pacte de confiance » entre les citoyens et leurs élus, la polémique autour du compte bancaire caché de l’ancien ministre du Budget a amené l’exécutif à proposer toute une nouvelle batterie de mesures dont celles sur la transparence du patrimoine des élus. Un dispositif qui, avec d’autres, crée la polémique et enflamme les débats au Parlement autour des projets de loi de transparence de la vie publique.
« France 2013 : les nouvelles fractures », enquête Ipsos pour "le Monde", le Centre d’études de la vie politique et la Fondation Jean Jaurès. - Retourner au texte
Sommaire du dossier
34 articles Lire le 1er article- Article 01 - Prévention de la corruption : la difficile appropriation au sein des collectivités
- Article 02 - Le Conseil constitutionnel ouvre aux regards ses « portes étroites »
- Article 03 - Le casier judiciaire vierge pour être élu, une moralisation nécessaire ?
- Article 04 - La suppression de la réserve parlementaire, pomme de discorde entre députés et sénateurs
- Article 05 - Ethique publique : « pas de chasse aux sorcières » mais la quête de « flous juridiques »
- Article 06 - L’exécutif veut limiter le cumul dans le temps à trois mandats identiques successifs
- Article 07 - La suppression de la réserve parlementaire phagocyte l’audition de la Garde des Sceaux
- Article 08 - « Il n’y a jamais eu autant d’élus, et autant de gens qui se sentent mal représentés »
- Article 09 - « Il n’y a pas davantage d’élus malhonnêtes aujourd’hui qu’hier »
- Article 10 - Elections : « Il faut jouer le jeu de la transparence avec les électeurs »
- Article 11 - Réserve parlementaire : le détail des subventions sénatoriales en 2015
- Article 12 - L’Agence nationale de prévention de la corruption se penchera aussi sur les collectivités
- Article 13 - Transparence de la vie publique : le premier rapport de la Haute autorité clarifie le risque de conflit d’intérêts
- Article 14 - Transparency International ne veut pas de remise en cause du non-cumul des mandats
- Article 15 - Moralisation de la vie politique : les nouvelles obligations des conseillers régionaux
- Article 16 - « Il serait extravagant de revenir sur le non-cumul des mandats »
- Article 17 - « Parmi les élus, le réflexe “déontologue” reste à acquérir »
- Article 18 - La transparence de la vie politique ne fait pas beaucoup d’adeptes
- Article 19 - Des propositions pour « renouer la confiance publique »
- Article 20 - Lobbying : les mauvaises notes de la France
- Article 21 - Un député UMP favorable à la transmission de la réserve parlementaire au préfet
- Article 22 - Elus locaux et conflits d’intérêts : parution du décret d’application
- Article 23 - La transparence de la vie politique, « urgence » démocratique – Introduction
- Article 24 - Les élus locaux ont jusqu’au 1er juin 2014 pour transmettre leurs déclarations d’intérêt et de patrimoine
- Article 25 - Transparency International demande l’exemplarité aux candidats aux municipales
- Article 26 - Conflits d’intérêts et transparence : de nouvelles obligations pour plusieurs milliers d’élus locaux
- Article 27 - Le Conseil constitutionnel valide pour l’essentiel les lois sur la transparence
- Article 28 - La transparence sera aussi locale
- Article 29 - Indemnités des élus : quelles sont les pratiques ?
- Article 30 - Vers le contrôle des déclarations de patrimoine et d’intérêts des responsables des grands exécutifs locaux
- Article 31 - Responsabilité pénale des élus locaux : trente ans d’évolution
- Article 32 - Avantages en nature des élus locaux : les règles du jeu
- Article 33 - Daniel Lebègue, président de Transparency International France : « Il faut restaurer la confiance entre élus et citoyens »
- Article 34 - Conflits d’intérêts : élus locaux, la prudence est de mise
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